La Photographie peinte : Invoquer la peinture
Arts visuels

La Photographie peinte : Invoquer la peinture

Avec l’exposition La Photographie peinte, le Musée canadien de la photographie contemporaine propose, dans son programme estival, les oeuvres de David Bierk, Sarah Nond et Jaclyn Shoub.

Bien que les oeuvres de ces trois artistes se retrouvent au Musée canadien de la photographie contemporaine (MCPC), leur démarche plastique, soit de retoucher et même de reconstruire leurs photographies avec la peinture, n’a rien de contemporain. Les premiers photographes, au XIXe siècle, se servaient déjà du langage pictural et des techniques de la peinture dans la fabrication de leurs oeuvres photographiques.

Les compositions de David Bierk reproduisent des paysages où la domination de la trame photographique est bien sentie sous la peinture. À peine perceptible, la délimitation des contours de quelques photographies du support de l’oeuvre apparaît sur la surface. Cet indice formel nous révèle deux systèmes de représentation a priori contradictoires. Bierk construit des images grâce à deux médiums opposés et pourtant devenus insécables.

Souvenir de Californie, ciel bleu/réflexion de David Bierk, 1992, huile sur photographies sur toile. Collection d’Elizabeth Bierk.

De même que celles de David Bierk, les images de la série Paysages fragiles de Sarah Nind sont conçues sur des photographies et ne cachent pas davantage les interventions du pinceau. Ces images très contrastées présentent des zones où l’utilisation de la peinture vient compléter et même confirmer leur caractère "apocalyptique".

Le travail de Jaclyn Shoub, lui, semble procéder à l’inverse de celui des deux autres artistes. C’est le photographique qui résiste à la peinture et qui paraît ajouté sur la surface peinte. La peinture ne réduit l’image photographique qu’à quelques vestiges lui résistant.

Même si chacun des artistes a des interrogations en toile de fond, il est évident qu’ils sont tous préoccupés par une action directe de la peinture sur la photographie (ou dans le photographique). Leurs interventions sur la surface de la photo n’est pas étrangère à une conception moderniste de la peinture. Ainsi, leur travail met en lumière des préoccupations qui nous sont rarement avouées dans les arts actuels. Néanmoins, ces oeuvres sont bien contemporaines et annoncent peut-être une nouvelle conjoncture artistique où, de plus en plus, les artistes acceptent de montrer l’innommable en s’appuyant sur une intuition individuelle.

L’exposition La Photographie peinte pourrait nous apparaître comme une sorte de trêve à la théorie: ici, rien ne servirait d’en parler davantage, au risque de regarder à l’extérieur du cadre, c’est-à-dire des oeuvres qu’il faut voir. En même temps le MCPC nous invite également à visiter La Rue, une exposition qui regroupe des images de Robert Frank, Tom Gibson, Robert Walker, Michael Schreir, Dave Heath et Justin Wonnacott. Malgré la qualité de chacune des démarches, la pertinence de les regrouper sous cette même bannière paraît incertaine.

Jusqu’au 19 novembre
Au Musée canadien de la photographie contemporaine
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