Nicolas Baier : Images du temps présent
Nicolas Baier, Geneviève Cadieux, Lynne Cohen, Stan Douglas, Pascal Grandmaison, Isabelle Hayeur et bien d’autres artistes d’ici sont au MBA. L’art québécois et canadien va plutôt bien.
Le Musée d’art contemporain (MAC) et le Musée des beaux-arts (MBA) se sont-ils passé le mot? Je ne sais si les deux grands musées montréalais ont vraiment opté pour une politique similaire sur le long terme, mais ponctuellement, ces temps-ci, ils prennent des décisions très semblables et très favorables au milieu de l’art d’ici. Le Musée d’art contemporain a décidé de mettre à l’affiche, tout l’été, trois artistes canadiens (dont deux Québécois, Grandmaison et Roy-Bois). Et voici que le Musée des beaux-arts emboîte le pas et nous présente jusqu’à l’automne un panorama actuel de l’art canadien et québécois.
Voilà des partis pris très importants pour notre art, car ils donnent une reconnaissance vitale à nos créateurs. Trop souvent, au Québec et au Canada, nous avons eu des étés remplis de blockbusters d’artistes anciens ou uniquement étrangers (Monet et la tartine impressionniste, Rodin et Camille Claudel…). D’ailleurs, trop souvent dans le monde, les musées agissent ainsi. Dans certaines villes, il est parfois difficile de voir de l’art actuel du pays que l’on visite, cet art étant absent des grandes institutions qui devraient pourtant défendre (aussi et surtout) l’art contemporain de leur nation. Espérons que nos deux musées continuent dans l’avenir, lors de l’importante saison estivale, à montrer aux touristes étrangers et canadiens, ainsi qu’aux Montréalais, de l’art fait ici. Qui pourrait mieux défendre notre art que nous-mêmes?
Que recèle donc cette expo au MBA, intitulée Son et Vision? Pour assurer un panorama canadien de qualité, le Musée s’est associé à deux autres institutions, le Musée des beaux-arts de l’Ontario (à Toronto) et le Musée des beaux-arts du Canada (à Ottawa). Le résultat est d’une qualité indéniable. La liste est impressionnante, vous y verrez des pièces d’artistes majeurs tels que Jeff Wall, Michael Snow, AA Bronson… De plus, les commissaires, dont le conservateur Stéphane Aquin du MBA, ont eu raison de prendre la photo et la vidéo comme sujet pour cette présentation, ces moyens d’expression étant en effet des instruments de réflexion primordiaux pour nos artistes contemporains. Si certains amateurs et même acheteurs veulent tirer une leçon de cette expo, elle est évidente et depuis plusieurs années indéniable: nous avons de très grands photographes au Canada. Même quand certaines oeuvres ne sont pas photographiques, elles réfléchissent néanmoins ce médium. Tel est, par exemple, le cas de cette sculpture d’Evan Penny (L. Faux-Tri) montrant un visage de femme totalement flou… Cela fait certes penser au travail hyperréaliste de l’artiste australien Ron Mueck, mais c’est une des belles surprises qui attendent le visiteur au tout début du parcours.
Plusieurs autres moments forts dans cette expo. La salle centrale, avec d’un côté les photographies de Lynne Cohen et de l’autre les images de Stan Douglas, est superbe à la fois par le choix des images et par la qualité de l’installation des oeuvres. Lynne Cohen me ravit toujours autant, sinon encore plus que par le passé.
Certes, j’aurais aimé un peu plus de Québécois dans cette présentation. Sur vingt-trois artistes, il n’y en a malheureusement que six. Se dessine une cartographie de la création canadienne qui se partage en trois villes: Montréal, Toronto et Vancouver. Montréal semble être en fin de peloton et Vancouver domine avec dix artistes, et pas les moindres (Jeff Wall, Stan Douglas, Rodney Graham, Ken Lum…). Un constat légèrement embêtant… Néanmoins, voici une expo impeccablement montée et à ne pas rater.
Jusqu’au 22 octobre
Au Musée des beaux-arts
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