Montreal Sound Matter, a_dontigny : Architecture sonore
Dans Montreal Sound Matter, a_dontigny, Louis Dufort, Chantal Dumas, Steve Heimbecker, Mathieu Lévesque, Francisco López, Tomas Phillips et Hélène Prévost interrogent le pouvoir évocateur des sons.
Cette semaine, je vous convie à une expérience étrange. Dans cette expo, que je vous propose de tester, nuls tableaux ou sculptures, nuls vidéos ou photos. En fait, elle ne recèle tout simplement aucune image! Toute la petite salle de la Galerie Éphémère, dans le Vieux-Montréal, est plongée dans une quasi-obscurité, seules quelques lampes suspendues au plafond avec des ampoules de faible intensité viennent doucement éclairer ici et là quelques bancs recouverts de noir et des murs tendus de tissus foncés. Ce n’est pas le monde du visuel qui est ici convoqué… Cela vous prendra même plusieurs minutes pour que vos yeux arrivent à s’habituer à cette pénombre et que vous puissiez enfin percevoir l’espace que je viens de vous décrire. Voilà qui pourra surprendre.
Mais les oeuvres sonores ont la cote en art contemporain depuis quelque temps. À Montréal, on se rappellera, entre autres, les interventions de Janet Cardiff au Musée d’art contemporain. Et les amateurs se souviendront aussi de la pièce Spica de Rober Racine (à la Galerie René Blouin) où une voix féminine suave égrenait des noms d’étoiles. Sur la scène internationale, ce type d’intervention a aussi la faveur des recherches les plus excitantes. Dernièrement, le célèbre Bruce Nauman occupait magistralement, juste avec l’aide de sons, le gigantesque hall de la Tate Modern à Londres.
Même si de telles propositions pourront en dérouter certains, voilà néanmoins une intéressante prise de position. Dans ces interventions, l’objet d’art facilement reproductible (dans les journaux et revues) est remplacé par une expérience physique qui défie le hors-temps de la reproduction.
Même si des bancs vous invitent à vous asseoir, je vous conseille de déambuler dans l’espace de la galerie. Vous y réaliserez encore plus comment cette intervention joue sur l’idée de vous faire vivre une expérience sonore particulière. Vous saisirez aussi encore plus comment les artistes ont travaillé la spatialité des sons, leur capacité à créer une certaine forme d’architectonie.
Mais il y a plus. Dans cette expo montée par le commissaire Francisco Lopez, les sons proviennent de "fragments de captations" réalisées à Montréal. Vous y reconnaîtrez des chants d’oiseaux, des bruits de machines… Mais il ne s’agit pas ici de rejouer une expérience intéressante que le Centre Canadien d’Architecture (CCA) met en scène dans son expo Sensations urbaines (qui se poursuit jusqu’au 10 septembre). Dans une salle du CCA sont diffusés des bruits captés dans des villes afin de montrer comment l’expérience d’une cité passe par autre chose que simplement l’architecture. Comme on pourrait le dire d’un instrument, chaque localité aurait une sonorité particulière. À la Fonderie Darling, ce n’est pas ce genre de démonstration qui est mise en scène. Les bruits de la ville y deviennent vite des abstractions, des sons utilisés pour leur musicalité. Cette expo collective devient alors presque le manifeste d’une nouvelle musique dont les instruments seraient tous les éléments d’une cité.
Jusqu’au 27 août
À la Fonderie Darling
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