Studio Premières Lignes : Rêver, ou l'art zen de la BD
Arts visuels

Studio Premières Lignes : Rêver, ou l’art zen de la BD

L’exposition De quelques lignes assemblées du Studio Premières Lignes plonge dans l’imaginaire débridé de quatre artistes de la bande dessinée se démarquant par leur approche intimiste.

Oubliez la bande dessinée de votre enfance: l’exposition De quelques lignes assemblées, à la Galerie de l’UQO, présente le travail de bédéistes du Studio Premières Lignes fusionnant les styles et façonnant leurs scénarios tels de subtils macrocosmes privés qu’ils partagent avec les lecteurs. En effet, les super-héros font place à des êtres imaginaires mais prenant racine dans une certaine réalité, et les auteurs n’hésitent pas à aborder des thèmes tels que la guerre, le rêve ou les fantasmes, sans détour.

André St-Georges, qui présente les planches de Sexe, Stout et Ballons de foot…, explique qu’il amorce son projet avec un thème, dans ce cas-ci le rêve se métamorphosant en une violente obsession. Laissant libre cours à son imagination, il sonde différents synopsis où s’enchevêtrent fantasmes et interdits, tout en forgeant une facture distinctive. "Je porte attention aux clairs-obscurs et je veux créer une ambiance plutôt que de rechercher le dessin parfait, explique St-Georges. De nos jours, le style d’un auteur est plus important que les personnages. Le bédéiste fait un peu un trip d’égoïsme et espère que le public va accrocher, mais il n’y a pas de garantie!"

Pour Christian Quesnel, les récentes planches marquent un retour à une forme plus ou moins abandonnée il y a quelques années: un style intimiste et une recherche de liberté ceinte d’une atmosphère lyrique minimaliste mais néanmoins poignante. Les scénarios de Quesnel sont subtilement ficelés et ponctuent les planches, ornées d’images fortes et envoûtantes. Mélange de réalisme et de rêve, Le Fantasme de résurrection nous entraîne dans les confins de l’isolement forcé et de l’inexorable désir d’évasion. "Cet oiseau qui vole au-dessus des barbelés symbolisait à lui seul le thème de ce récit, le rêve, l’attente de la liberté. Mon ami poète Guy Jean y a vu quelque chose d’encore plus beau que la liberté. Il a vu l’oiseau qui traverse les barbelés d’Auschwitz, ne passant plus seulement de la détention à la liberté mais bien de la mort à la vie, dans ce qu’elle a de plus simple", écrit Quesnel dans un texte explicatif.

Planche de Frédérick Lavergne. Série Le monde… est-ce un rêve?.

Le parcours de Frédérick Lavergne est peu commun. Ex-soldat ayant servi en Bosnie, il a adopté la BD afin de traduire la misère qu’il a croisée. Avec une grande sensibilité et un dessin aux traits fins, il dépeint un monde lugubre. "L’absence de couleur rend cet endroit austère… À la vie humaine… Mais elle y vit… Ou devrais-je dire subit." [Extrait de l’oeuvre Le monde… est-ce un rêve?] Dans son oeuvre intitulée Où vont les rêves?, Pierre Savard nous entraîne dans les aventures d’un robot arborant de larges ailes et qui tente de s’arracher du quotidien. En vain?

L’exposition De quelques lignes assemblées suppose une certaine mise à nu de la part des auteurs: elle renferme certes de très nombreuses oeuvres à admirer mais constitue également une immersion dans leur espace créatif. Au moyen d’objets, d’images, de trames sonores ayant servi d’inspiration, d’un très beau catalogue et de textes libres et révélateurs du processus entamé par chacun, le visiteur (voyeur?) a le rare privilège de pénétrer l’univers mystérieux des bédéistes. www.premiereslignes.com.

Jusqu’au 26 octobre
À la Galerie de l’UQO
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Soif de BD? Ne manquez pas le Rendez-vous international de la bande dessinée de Gatineau, qui se déroulera du 18 au 22 octobre. Notez que l’édition 2006 aura lieu au Musée canadien des civilisations. Pour de plus amples renseignements, consultez le site du Salon du livre de l’Outaouais au www.slo.qc.ca.