Karen Spencer : Rêver mieux
Arts visuels

Karen Spencer : Rêver mieux

Karen Spencer voit dans le visage des sans-abri la même fugacité qu’on associe au rêve. Ils sont passagers clandestins de notre vie, et disparaissent comme ils sont venus.

Les rêves nous harcèlent parfois jusque dans nos retranchements les plus calmes. Déambulant au hasard des rues, ils nous frappent soudainement, sortant de l’oubli sans raison apparente. Même – et peut-être surtout – lorsque nous avions eu la certitude de ne pas avoir rêvé. Ils sont fugaces et volatils, ne se présentent que pour distraire, puis se dissiper à nouveau. Qu’est-ce qui les aura fait renaître?

Avec Votre rêve dans mon oreille, Karen Spencer s’intéresse à la fois au rêve et au monde de la rue. Parce que tout n’y est que passage, sans cesse en mouvement et en disparition. On effeuille nos rencontres comme des éphémérides se perdant au recyclage de la mémoire.

Quinze fois sur le pavé, exhibez votre rêve… L’artiste en résidence de création à la galerie Le Lobe a exposé aux passants les rêves qui se sont immiscés au coeur de ses nuits: au réveil, elle les relatait succinctement sur un carton puis en faisait montre en pleine rue. Les badauds, témoins de cette mise en scène de l’intime, répondaient de différentes façons au travail de l’artiste; certains la contournaient dans l’indifférence, d’autres l’abordaient simplement, comme ils l’auraient fait avec un sans-abri quémandant quelque pécule.

Spencer n’en est pas à ses premières errances sur la scène de l’itinérance puisque, pour un précédent projet, elle avait vécu recluse pendant plusieurs centaines d’heures dans les dédales du métro de Montréal. Son dernier projet entamé dans notre région, dont on peut voir les traces à la galerie Le Lobe jusqu’au 11 novembre, continuera d’errer dans la métropole, chapeauté entre autres par l’organisme Homeless Nation – dont vous connaissez peut-être le site Internet, créé par et pour des sans-abri (www.homelessnation.org). L’artiste, qui a déjà fait des démarches auprès de la Maison d’accueil des sans-abri de Chicoutimi, verra alors comment une relation plus poussée avec les itinérants pourra permettre à son projet d’évoluer. "Il faut que les sans-abri décident eux-mêmes de la façon dont ils participeront au projet – si toutefois ils décident de participer…" déclare-t-elle sans se créer de trop fortes attentes, consciente qu’il est important d’ouvrir des portes aux déshérités, mais pas nécessairement de les forcer à en traverser le seuil.

Jusqu’au 11 novembre
Au Lobe
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