Marie Dumais : Microcosmos
Marie Dumais se met en scène dans Bestiario de Javier Tomeo, un spectacle dont les images finement ciselées nous font pénétrer dans l’univers des insectes. Hymne à la beauté.
Sur la soixantaine de monologues d’insectes du texte original, Marie Dumais en a retenu et réorganisé une vingtaine, de manière à créer une ligne dramatique. "Dans le fond, c’est ceux qui me touchaient le plus, mais surtout, ceux que je pouvais mettre en images, qui étaient les plus théâtraux, remarque-t-elle. J’aime travailler par petits moments séparés. Comme quand j’ai monté Histoires minimales du même auteur. L’adaptateur peut alors créer tout un univers et y mettre ces morceaux-là. C’est ludique et ça me donne une grande liberté." À travers cette enfilade d’instants, c’est par ailleurs de beauté dont il est question, une qualité répondant parfois à de cruels impératifs. "Pour leur survie, les insectes se sont constamment adaptés et transformés; ils ont essayé d’imiter la nature ambiante et sont devenus des objets magnifiques", rappelle-t-elle.
Évolution qui aurait, selon les scientifiques, tourné au délire esthétique et qui se trouve, elle aussi, au centre du propos. "Il n’y a qu’un personnage en scène, un être en métamorphose, en devenir, note-t-elle. Son costume (Janie Gagnon), ou sa peau, peut se défaire, comme une espèce de chrysalide. Tandis que les projections vidéo (Lionel Arnould) les changent, lui et tout son environnement (Martin Beausoleil), dont la structure rappelle celle de l’insecte." Cela dit, elle spécifie: "Évidemment, je ne me transforme pas tout le temps. Parfois, on évoque l’insecte autrement; j’en parle, c’est une marionnette (Pierre Robitaille)… C’est très, très coloré, et ce qui est important, aussi, c’est l’environnement sonore (Tristan McKenzie)." Sur le plan du jeu, qui l’amène entre autres à interpréter quatre chansons, elle privilégie du reste la sobriété. "Il y a beaucoup de sarcasme et d’ironie, mais c’est pour exprimer une certaine pudeur, observe-t-elle. Il n’y a pas de grands pleurs ni de grands rires, là-dedans. Ce n’est pas joué sur les émotions; c’est un jeu esthétique."
Bien sûr, le tout appelait une démarche particulière. "Ça a vraiment été un travail technique, évoque l’artiste. Là, je ne répétais pas avec des comédiens, mais avec des concepteurs. On a essayé de trouver les idées en salle. Peut-être que ça ressemble plus à un travail d’installation d’artiste en arts visuels. Mais ce n’est pas du tout ce que ça donne; ça donne du théâtre." Elle considère d’ailleurs que le plus grand défi de cette aventure était "de trouver le médium adéquat pour rendre ça vivant sur scène". Un problème auquel ils ont dû apporter leur propre solution. "Mais c’est ce que j’ai toujours aimé faire: chaque fois, monter une production qui ne ressemble pas à la dernière, affirme-t-elle. Et quand on va ailleurs, on ne sait pas comment faire; en ce sens, c’est de la recherche. Alors, on s’est demandé comment évoquer cet univers mystérieux, fascinant, beau, mais en même temps parfois étrange et repoussant. Et c’est par la vidéo, les images qui bougent et qui enveloppent tout l’espace qu’on a réussi, je pense, à le faire. On a travaillé avec la peinture corporelle (Nathalie Simard) et on a fait un costume qui pouvait s’y mélanger et recevoir la projection. Ça reste un spectacle très simple, très humble de par ses moyens. Mais finalement, ça a donné un tout cohérent." Et intrigant…
Du 2 au 19 novembre à 20h
À la Caserne Dalhousie
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