Simon-Pier Lemelin : L’oeuvre orignal
Simon-Pier Lemelin est le premier artiste de la maîtrise en arts de l’UQAC à voir les portes de la Pulperie s’ouvrir à son art. Un premier pas concluant qui encouragera certainement à réitérer l’expérience.
D’esthétique moins ludique que son précédent projet présenté à Séquence, l’actuelle exposition de Simon-Pier Lemelin, sise entre les murs de la Pulperie, offre certainement un travail tout aussi léché. Avec Lemelin, tout est à sa place, l’art n’est pas une question de hasard.
Dans l’exposition intitulée Principe immatériel vital, la chasse et la pêche sont présentées par l’artiste comme les symboles de rapports spirituels à la vie et au réel. Les techniques servant aux sportifs à leurrer une proie sont autant d’interpellations pour atteindre une réalité fugitive qu’on cherche à observer ou capturer. Ainsi, l’artiste devient prédateur d’une réalité à laquelle l’accès n’est jamais total ni immédiat, une distance abstraite ou symbolique séparant l’homme de sa spiritualité, ou de lui-même. Cette distance inaliénable qu’impose toute lecture de notre environnement nous place dans un rapport au réel qui n’est alors jamais plus que diffus. En effet, avec Lemelin, on n’a accès qu’au contour des choses, et même la technologie la plus moderne dont on trouve la trace dans ses tableaux – celle-là même à laquelle nous accordons tant de crédibilité dans notre société, qui donne parfois (à tort) cette impression d’une clarté et d’une précision jamais atteintes – ne révèle en fait que le tracé diffus d’un réel qui ne se donne pas à voir, qui reste la plupart du temps caché, ignoré. Comme l’animal, maître du camouflage, la vérité a tôt fait de nous glisser entre les doigts, de se dérober à notre regard.
À l’orée de la pièce, un homme sombre, silhouette de lui-même, supporte mal sa tête d’orignal, qui semble disproportionnée. Comme si le poids de la spiritualité était trop lourd pour être supporté, témoignage muet et désarmant d’une société en perte de valeurs spirituelles. Les seules traces indélébiles que laissera l’entité esseulée sur le tertre sombre où il semble déambuler, ce sont celles qui se rapprochent le plus de sa vie spirituelle, des traces d’orignal, malgré un pas profondément humain.
Jusqu’au 21 janvier 2007
À la Pulperie de Chicoutimi
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