Sonia Boudreau : Mort ou vif
Sonia Boudreau a le souci du détail avec ces quelques symbioses qu’elle présente au CNE. Une rare incursion dans le bio-art qui permet de se familiariser avec différentes possibilités offertes par cette pratique artistique.
Dans une région comme la nôtre, où il est généralement admis que nous faisons corps avec le paysage, il est sans doute très pertinent de s’interroger sur les possibilités du bio-art. Comment intégrons-nous notre environnement? De quelle façon sommes-nous en retour influent sur lui? C’est une riche préoccupation du vivant et du rapport qu’il entretient plus particulièrement avec l’art qui est à la source des créations auxquelles Sonia Boudreau a donné vie pour l’exposition Quelques Symbioses dans le détail.
Ses symbioses délicates entre la vie et l’art, entre le vif et l’artistique, entre l’évolutif et le stabile suscitent plusieurs interrogations. L’art n’est-il pas de toute façon indissociable du vivant, sans cesse soumis à sa lecture pour se poser comme existant? N’est-il pas a priori vivant, nourri par le regard et évoluant au gré des rapports qui se renouvellent sans cesse à mesure que se présentent les visiteurs?
L’hybridation qui se matérialise dans son travail place certainement le lecteur de l’oeuvre comme témoin d’un rapport plutôt que partie prenante de ce dernier, comme si l’oeuvre d’art, tout à coup, devenait indépendante, maîtresse, désireuse et volontaire, au-delà de notre propre volonté.
Les différentes oeuvres que l’artiste a choisi d’exposer se situent donc quelque part entre la vie et la mort. Il y est question de multiples naissances, alors que germent différentes graines ou se développe la moisissure dans les univers clos aménagés par l’artiste. La vie ensachée évolue sans cesse depuis le vernissage de l’exposition, les oeuvres générées échappant au contrôle de l’artiste, pourtant généralement perçu comme "créateur absolu" de son art. D’autres oeuvres s’attardent plutôt à la question de la mort. Dans certains cas, Boudreau exploite la trace du vivant (par exemple la fourrure). Pour d’autres oeuvres, l’art enveloppe littéralement le vivant jusqu’à l’étouffer; c’est, entre autres, le cas d’un arbrisseau rabougri qui ploie sous une membrane bleue ainsi que d’une plante qui s’effeuille, tapissée de blanc.
Sonia Boudreau développe donc une réflexion sur la vie elle-même, sur l’interrelation, voire l’interdépendance entre l’être humain et le reste du règne du vivant. Se posant comme une observatrice méticuleuse de la vie, l’artiste propose, au moyen de dessins, de tableaux et de sculptures, différentes correspondances entre les êtres vivants, coïncidences visuelles s’inspirant de l’imagerie de la biologie, dont le rapport est permis grâce à une altération des échelles. Le papier fin, superposé en membranes diaphanes, laisse voir ses dessous, parfois inversés ou incomplets, montrant que la vie peut être un calque d’elle-même.
Si vous donnez signe de vie au Centre national d’exposition, ne manquez pas de visiter aussi Présences figuratives, l’exposition présentée dans les salles adjacentes, qui collige une impressionnante sélection de sculptures provenant des collections du Musée national des beaux-arts du Québec.
Jusqu’au 14 janvier
Au Centre national d’exposition
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