Fernando Botero : Parlons travail
Arts visuels

Fernando Botero : Parlons travail

Discussion à bâtons rompus avec le peintre Fernando Botero, qui cause ouvertement de son art, de ses habitudes, du succès et d’un style duquel il n’a jamais pu se dissocier.

Vous venez à Québec à l’occasion du lancement de l’exposition L’Univers baroque de Fernando Botero, pouvez-vous nous en parler un peu plus?

"C’est une exposition qui est organisée par Art Services International et dont la première présentation nord-américaine est à Québec, et j’en suis très content! Ils ont fait une belle sélection. C’est une forme de rétrospective qui va couvrir une large période, de 1949 à 2006. Cela va de soi que ce n’est pas une exposition exclusivement de grosses femmes, même si c’est ce que les gens remarquent le plus dans mon travail; j’ai fait aussi des natures mortes, des portraits… Bref, j’ai traité plusieurs sujets universels de la peinture."

Et comment vivez-vous la notoriété internationale?

"Je me sens très privilégié d’avoir connu le succès de mon vivant. Avant, c’était beaucoup plus difficile d’être connu, mais aujourd’hui, c’est plus facile."

Outre ce fait, il y a surtout du travail en arrière de votre style, de vos oeuvres et de cette reconnaissance internationale, n’est-ce pas?

"Je vis ma vie au travail. Même en voyage au Mexique, j’ai ma table à dessin – en passant, le dessin est à la base de tout, surtout quand on est un peintre figuratif, c’est très important. Je travaille de sept à huit heures par jour. Je suis toujours en train de travailler, ça me relaxe, j’aime ça. Je suis un artiste heureux. Il y a l’artiste malheureux, mais moi, mon idée de l’art, c’est de le faire heureux, dans le plaisir, c’est de faire de l’art dans l’extase, comme Rubens, Vélasquez. Tous les grands peintres sont et ont été heureux, sauf Van Gogh, mais je crois que s’il avait vécu plus longtemps, 20 ou 30 ans de plus, il aurait fini par devenir un peintre heureux, parce que l’art, c’est croire en la vie, avoir l’amour de la vie."

Cet amour de la vie, vous l’avez transformé en un style qui vous est propre, c’est d’ailleurs ce qui fait qu’on reconnaît vos oeuvres, mais pourquoi avoir gardé ce style toute votre vie?

"Parce que l’artiste ne peut changer son style. Il se retrouve dans tout ce qu’un peintre peint. Bref, le style, c’est très important, il ressort naturellement. Si je voulais faire un style différent, je ne serais pas capable, je n’y arriverais pas, ça fait partie de moi, on est des gens qui ne peuvent faire autrement. De la même façon que le style est important, les racines d’un artiste sont très importantes. Et comme la peinture me permet de partager mes racines avec l’ensemble de l’humanité, parce que le langage de la peinture est universel, j’utilise beaucoup ce médium. L’homme est sensible à la couleur, aux formes, c’est une façon de parler à tous. La preuve, c’est que partout où j’ai exposé, j’ai reçu un accueil positif. On comprenait ce que je voulais exprimer, même si je ne parlais pas leur langue ni eux la mienne. J’ai cultivé mes convictions profondes, j’ai fait la même chose que mes prédécesseurs, des portraits, des natures mortes, mais je les ai présentés d’une façon différente. C’est à partir de ce moment qu’on se rend compte qu’on est différent des autres. Et pour moi, c’est un plaisir de partager mes toiles partout à travers le monde."

Jusqu’au 22 avril 2007
Musée national des beaux-arts du Québec
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