Pellan : Consécration suprême
Arts visuels

Pellan : Consécration suprême

L’exposition Pellan, présentée au Musée national des beaux-arts du Québec, consacre l’esthétique surréaliste d’un des plus grands peintres québécois: Alfred Pellan.

Ce n’est pas sans peser ses mots que le poète Roland Giguère a un jour parlé de Pellan en ces termes: "Il nous en fait voir de toutes les couleurs/et sa magie nous ouvre toutes les demeures." En s’exprimant ainsi, Giguère nous décrit en deux vers toute l’étendue et la portée de l’oeuvre de l’une des figures mythiques de la peinture québécoise du XXe siècle. Né à Québec en 1906, Pellan peint son premier tableau à l’âge de 14 ans (Fraises, qu’on retrouve à l’entrée de la nouvelle salle permanente du MNBAQ). Six ans plus tard, Pellan va étudier à l’École supérieure des beaux-arts de Paris et revient par la suite au Québec. C’est à partir de ce moment qu’il commence à créer pour ses premières expositions en sol canadien. Rapidement, il deviendra un des chantres de la peinture canadienne.

Et si 1955 est l’année du sacre de l’artiste par la Ville Lumière (le Musée national d’art moderne de Paris offre la première rétrospective de l’artiste), il faudra attendre 1972 avant d’avoir le même genre d’exposition rétrospective au Canada. Il recevra finalement en 1984 la plus haute distinction en arts visuels au Québec, le prix Paul-Émile-Borduas.

Il ne lui manquait plus qu’une salle permanente dans un musée. C’est maintenant chose faite.

L’exposition Pellan, dont le commissariat a été assuré par Michel Martin, conservateur de l’art contemporain (1950 à 2000) au MNBAQ, est très bien construite. Elle regroupe 17 magnifiques et colorées peintures, une somptueuse tapisserie, 22 masques aux couleurs vives et 4 oeuvres sur papier montrant autant la maîtrise technique que la virtuosité de Pellan.

Qu’il peigne ou dessine des portraits (Jeune Fille au col blanc [1933 ou 1934], Tête de jeune fille [1935]), qu’il transpose sur toile les chimères de son esprit (Bestiaire 24 [1981]), qu’il transforme la réalité sur ses tableaux par des procédés empruntés aux cubistes (L’homme A grave [entre 1948 et 1950], Citrons ultra-violets [1947], La Chouette [1954], S’abstenir [1958]) ou qu’il applique avec une très grande précision l’acrylique sur les masques de plastique des comédiens jouant dans La Nuit des Rois de Shakespeare en 1946, l’expression d’Alfred Pellan est toujours juste. C’est peut-être ce qui en a fait l’un des principaux artisans de l’avènement de la modernité au Québec.

Au Musée national des beaux-arts du Québec
Salle permanente
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LE CARNET D’ÉMILE NELLIGAN

"Ce fut un grand Vaisseau taillé dans l’or massif (…)/Hélas! Il a sombré dans l’abîme du Rêve!" Émile Nelligan fut, comme dans son célèbre poème, un grand vaisseau d’or qui a sombré dans l’abîme de la schizophrénie. Or, malgré la maladie, il était apprécié des infirmières qui le soignaient. Elles aimaient l’entendre réciter ses poèmes, qu’il connaissait par coeur. C’est justement Les Tristesses, l’un des huit manuscrits autographes de Nelligan – écrits pendant son internement à l’hôpital Saint-Jean-de-Dieu (1929-1938) et dans lesquels il retranscrivait de mémoire les poèmes de Verlaine, Baudelaire, Poe, Mallarmé ainsi que quelques-uns de ses anciens poèmes -, que nous présente le MNBAQ aux côtés du superbe bronze d’Alfred Laliberté Le Vaisseau d’or (1910-1911).

On expose à l’intérieur d’une vitrine le précieux document (acquis par Pierre Lassonde, président du conseil d’administration du MNBAQ, à Montréal en 2006) dans la salle Tradition et Modernité au Québec. On a ouvert le carnet de fortune à la page du Vaisseau d’or, ce qui permet au visiteur de voir l’écriture et de constater le trait puéril du crayon de plomb manipulé avec soin par notre poète au tragique destin.