François-Mathieu Hotte : Power trip
François-Mathieu Hotte s’arme de contrastes convaincants dans son exposition Fifteen Love présentée à l’OEuvre de l’Autre. Sous un aspect léché et hyper-contrôlé, il met l’instinct à l’avant-scène, exploitant sans convenances les filons de la virilité et du contrôle.
Dans ce travail de François-Mathieu Hotte, c’est la résurgence du primaire qui est mise à l’avant-scène. Comme les symboles virils qui se bousculent parmi ses oeuvres, la puissance s’y trouve partout exacerbée. On la trouve dans la forme phallique du dispositif de présentation de la vidéo auquel fait face le visiteur à son entrée – malgré cet aspect étrangement douillet d’une peluche immense et quémandant le pelotage -, mais aussi dans la présence de l’arme – arme à feu, masse d’arme affublée de l’épithète killer. Cette puissance trouve aussi son paroxysme dans le cri des personnages, dans leur posture ou leur gestuelle.
C’est donc un combat entre le contrôle et l’instinct qui se retrouve dans tous les éléments de cette exposition. Le geste, éminemment contrôlé dans le calcul et la concentration de celui qui tire du fusil avec une précision chirurgicale, semble parfois déborder du seuil du contrôle dans l’agressivité de certains personnages qui s’attaquent de manière irréfléchie à des objets ou à des individus. C’est le cas du groupe de tennismans qui semblent participer d’un fight club nouveau genre, alimentant un rapport violent et gratuit qui n’est pas sans rappeler les élucubrations de valorisation de l’agressivité du film Orange mécanique. Le parallèle entre l’équipe sportive et le gang de rue est d’ailleurs particulièrement bien développé par l’artiste, entre autres par la photo d’équipe, où la cohésion entre les membres est souvent brisée par une tension agressive mal contenue.
Fait à noter, la pénombre de la salle d’exposition crée une atmosphère plus ou moins saine qui contribue pour beaucoup à la force d’impact des oeuvres de Hotte. Le nouveau matériel d’éclairage de la galerie est particulièrement efficace pour donner cet aspect d’inquiétante étrangeté aux oeuvres.
Pièce marquante de l’exposition, la vidéo projetée en fond de salle, d’abord travestie en photo de famille, montre une mise en scène bourgeoise, presque stérile tant le calcul semble avoir été fait avec précision. Lorsque ce portrait presque figé est soudainement pris pour cible par un canon à balles, chaque détail d’abord soumis à un contrôle incisif devient part d’un chaos où tout est alors basculé par la puissance de l’impact des balles devenues projectiles. Et dans ce décor de plus en plus étrange, il n’y a que le spectre de l’animal qui subsiste, l’être humain en ayant été évacué par l’instinct de la peur.
Jusqu’au 18 avril
À l’OEuvre de l’Autre
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