Marc Fournel : Quelques vibrations
Marc Fournel provoque des alliances improbables entre science, mathématiques, informatique, architecture et art contemporain. Des oeuvres complètes pour une expérience complètement hors du commun.
Avec Oméga et [in], Marc Fournel donne beaucoup de pouvoir au spectateur de ses oeuvres. Ce dernier, par son regard, ses gestes ou ses déplacements, modifiera l’oeuvre elle-même ou encore la subtilité originale de la perception qu’il en a.
C’est déjà une expérience percutante que d’entrer dans la galerie, comme si on se heurtait au mur du son. L’ambiance sonore produite par Oméga – une collaboration de Jean-François Laporte -, d’abord assourdissante, semble étrangement plus tolérable à mesure que l’on s’approche du rutilant cylindre qui en absorbe les vibrations. Des cercles de lumière projetés en deux endroits, comme des follow spots figés par l’absence d’une cible, semblent attendre que l’on s’y arrête pour devenir vedettes de ce spectacle étrange. Puis cette lueur mouvante sous le caisson donne l’indice d’une activité visuelle à l’intérieur, invitant le visiteur à contourner et pénétrer la forme, doublant l’expérience essentiellement sonore d’une expérimentation optique particulièrement grisante.
Selon le point de vue, des silhouettes humaines se métamorphosent doucement, se délaient ou se multiplient, ou alors une main effleure d’une caresse froide le métal qui nous embrasse. L’illusion d’optique, créée par la concavité et la capacité de réflexion de l’écran métallique, rend chaque perception véritablement unique et originale. L’apport du visiteur n’est donc pas effectif seulement sur le plan du sens de l’oeuvre, mais aussi sur son aspect proprement visuel.
Même le son projeté avec force directement sur la mince face métallique de l’enceinte se voit perçu par tout le corps, comme un long frisson pénétrant et insistant. Le spectateur accueille alors de pied en cap les variations de fréquence et d’amplitude, savourant la réaction purement physique de cette réception.
[in] est une installation du collectif Plan B, dont Marc Fournel est l’instigateur. L’artiste lui-même considère cette dernière oeuvre comme un "bonbon". L’expérience en est effectivement plutôt amusante.
Une boule en peluche rouge suspendue au plafond cache en fait une caméra fixant le sol. L’image ainsi captée sert à créer des univers. Celui d’un monde plat, reproduction du cercle de lumière projeté au plancher, de l’ombre de la sphère velue. Puis, répondant à différents algorithmes préétablis par l’artiste – aidé en cela par Thomas Ouellet Frédérick -, ce monde se multiplie en plusieurs autres, des sphères qui danseront ou bondiront, leur mouvement étant orchestré – ou pouvant l’être – par la participation active du visiteur qui jouera le jeu sans se faire prier.
Non seulement devient-il possible d’influer sur le mouvement de la projection, mais le spectateur pourra même choisir l’image qui créera à chaque fois un nouvel univers, choisissant ce qui sera capté par la caméra, filmant ce que dictera son imagination.
Le soir, après la fermeture de la galerie, le même procédé est projeté en vitrine-écran, tirant cette fois son matériel visuel d’images captées parmi les émissions d’ondes télévisuelles. Ces ondes influencent alors aléatoirement l’oeuvre médiatique qui, grâce à la programmation préalable, se développe de façon autonome, a une vie propre. De quoi soulever quelques questions éthiques lorsque vient le temps de débrancher les appareils…
À voir si vous avez aimé Mathieu Valade, Manon Labrecque.