Thomas Corriveau : Figure de style
Arts visuels

Thomas Corriveau : Figure de style

Thomas Corriveau est le deuxième artiste à exposer au Centre de recherche, de diffusion et d’édition d’art Sagamie. Avec Autofictions, il se réincarne, se livrant – à sa façon – à la face du monde.

Le visage est à la fois très intime et pourtant partagé. Il permet de reconnaître chez l’autre la souffrance ou le plaisir, dissimulant souvent très mal ce qu’on voudrait garder pour soi. Il est une façade imparfaite qui dévoile la petite histoire de chacun, ses épreuves dérisoires… ses désirs et ses victoires.

Si le visage est pour plusieurs le seuil de l’identité, l’image à laquelle on s’associe plus ou moins volontiers, Thomas Corriveau a plutôt opté pour une désincarnation, une distanciation. Car dans chaque mise en scène plus ou moins sérieuse, on retrouve une figure de circonstance: la sienne. On le voit ainsi, à visage découvert, dans un corps de chien, de pirate, de super héros de bande dessinée, renaissant dans des scènes inspirées d’images empruntées à l’histoire de l’art ou à la culture populaire.

Le cadrage des oeuvres de Corriveau rappelant celui des portraits photographiques ou des clichés pris sur le vif, le visiteur aura le réflexe de lire les moments qui ont précédé ou suivi la prise de ces clichés, cherchera à établir l’histoire du personnage en face duquel il se trouve.

L’installation en sérigraphie intitulée Sophie, une oeuvre immense couvrant la totalité de l’un des murs de la salle, est une preuve loquace de l’attachement de l’artiste pour les techniques traditionnelles de la sérigraphie. Son intérêt particulier pour ce genre de pratique laisse toutefois des traces même dans la façon dont il conçoit ses images destinées à l’impression numérique, réduisant ainsi la distance que d’autres artistes cherchent à créer entre la nouvelle technologie et les arts plus traditionnels.

Chaque image est en effet décomposée en traits de couleur, laissant parfois l’impression d’une pluie irisée, d’un tourbillon coloré ou d’une explosion bigarrée. Les documents de travail de l’artiste, dessins au plomb ou à l’encre qui étaient appelés à servir de canevas pour chacune des couleurs des oeuvres présentées, montrent le degré de précision et la minutie qu’implique une telle entreprise, imposant le respect et la légitimité que la "facilité" des arts médiatiques, chez certains artistes, a évacués.

Devant certaines oeuvres, le visiteur sentira parfois son regard aspiré par des ondes concentriques vers l’oeil d’un personnage qui prend ainsi une importance capitale. La concentration des lignes de couleur vers ce point de tension impose une façon de voir l’oeuvre, rappelant la façon dont les yeux de deux personnes se croisent lorsqu’elles se rencontrent. L’oeuvre, parée de ses plus belles couleurs, acquiert ainsi une force d’attraction qui n’est pas loin de celle suscitée par l’acte de séduction.

DES LIVRES POUR SE RAPPROCHER

Le vernissage de l’exposition Autofictions a concordé avec le lancement de deux livres (Autofictions et Sophie), premières parutions de la nouvelle maison d’édition Sagamie: éditions d’art. Les éditions d’art de Sagamie devraient permettre la publication de livres d’artistes qui, en plus d’offrir une meilleure visibilité aux artistes exposant au centre de recherche en arts contemporains numériques Sagamie, favoriseront les échanges artistiques avec d’autres centres d’artistes canadiens.

Jusqu’au 25 mai
Au centre Sagamie
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