Mathilde Martel-Coutu : OEuvres de collection
Mathilde Martel-Coutu présente une exposition produite en Europe dans le cadre du programme de résidences croisées Alsace, France/Lac-Saint-Jean, Québec, organisé par Langage Plus.
Certains collectionnent les timbres, les gommes à effacer, même les voitures… Il faut admettre que quelques collectionneurs sont parfois un peu excentriques, mais jamais collection n’aura été si touchante que celles de Mathilde Martel-Coutu. Dans cette exposition intitulée Le Cabinet de mes curiosités, elle cumule, avec toute la délicatesse nécessaire à une telle entreprise, souvenirs ou souffrances moulés dans la matière, qui prennent ainsi corps dans le plâtre, le latex ou les minuscules paillettes photographiques minutieusement découpées.
Observer une à une les pièces exposées dans leurs écrins de verre ou de polymère, c’est être voyeur de douleurs qui ont laissé leur trace dans la mémoire de l’artiste, mais qui ne se révèlent pas facilement. Envisagé dans son ensemble, le détail se perd; pris à part, il n’est jamais plus que partiel. Le visiteur n’a donc jamais l’impression d’un véritable accès à l’intimité de l’artiste, qui ne se dévoile qu’avec parcimonie et pudeur.
L’une des collections de Martel-Coutu, particulièrement intime, collige les creux moulés de son propre corps. L’artiste offre ces moulages sans aucune protection, contrairement aux autres collections qui sont à l’abri dans des sphères ou des bouteilles rappelant le laboratoire stérile d’un apothicaire, ou qui semblent avoir leurs propres défenses, hérissées de clous. Ce choix donne l’impression que le corps et la peau, à la surface de l’être, sont moins précieux que les souffrances qui le hantent en profondeur, précautionneusement livrées dans ses autres collections.
Aux extrémités de la salle, deux immenses peintures se font face, se fuient et se répondent, accrochées comme du cuir tendu pour être tanné. D’un côté, la toile blanche et presque vierge, malgré les couches successives de peinture qui la couvrent, évoque la pureté de l’enfance et la fragilité. La toile qui lui fait face, sombre et texturée, craquelée et sillonnée de cicatrices révélatrices, s’impose comme la mémoire d’un mentor, lourde et douloureuse. Et entre les deux, l’expérience accumulée, les souvenirs rassemblés qui peut-être les séparent.
Quelques bribes de mémoire en offrande entre les murs de Langage Plus, jusqu’au 20 mai.