Pointe-à-Callière : Jeter des ponts
Arts visuels

Pointe-à-Callière : Jeter des ponts

Pointe-à-Callière nous présente, cet été, les trésors amérindiens des antiques collections royales de la France coloniale. Rencontre.

En partenariat avec le musée du quai Branly à Paris, Pointe-à-Callière nous offre l’exposition Premières nations: Collections royales de France. Cette dernière se compose de 85 objets, choisis et empruntés à l’une des plus belles collections de pièces amérindiennes issues de l’est de l’Amérique.

Appartenant à l’origine à des aristocrates français ou offerts en cadeau au roi, ces artéfacts reflètent l’aspect matériel des liens noués entre la France coloniale et les autochtones de la Nouvelle-France. Au temps où les Français apprennent des Amérindiens comment survivre dans un environnement qui leur est étranger, les Amérindiens empruntent et adaptent les techniques et les matériaux nouveaux apportés par ces derniers. Témoignages de la cohabitation des autochtones et des colons en terre d’Amérique, ces ouvrages, dont la beauté exotique a attiré l’attention des explorateurs, commerçants ou missionnaires, ont essentiellement été rapportés à la royauté à titre d’échantillons prélevés sur ses territoires outre-Atlantique.

Ramenés en France, puis conservés tout au long du régime français dans des cabinets de curiosités à des fins pédagogiques, les artéfacts ont ensuite été classés plus systématiquement, au 18e siècle, en tant que collections de sciences naturelles étrangères. Déplacées à maintes reprises, c’est à la Révolution française qu’ils subissent les plus grands changements de propriétaires, et un grand mouvement de protection de ce patrimoine a alors permis de sauvegarder leur intégrité, avant leur transfert à la Bibliothèque Nationale. En 1878, l’ensemble de la collection a été cédé au Musée d’ethnographie du Trocadéro, qui deviendra le Musée de l’Homme en 1937; c’est cette collection qui a récemment déménagé au musée du quai Branly.

NATIONS UNIES

N’eut été de son alliance avec les peuples amérindiens, jamais la France n’aurait pu étendre son influence pendant une aussi longue période sur un territoire aussi vaste, au moment où ses effectifs étaient incomparablement plus faibles que ceux des autres nations européennes installées chez nous. Au 18e siècle, l’explorateur Bougainville admettra d’ailleurs que c’est par la faveur et l’affection des Amérindiens que la France a pu conserver aussi longtemps les territoires du Canada de l’époque. Ces oeuvres proviennent donc de ce vaste espace, qui s’étend des Plaines de l’Amérique du Nord à la vallée du Saint-Laurent et de la Louisiane aux forêts subarctiques. Ces objets et cadeaux étaient habituellement obtenus durant des cérémonies diplomatiques – comme celle de la Grande Paix de Montréal de 1701, durant des échanges commerciaux ou lors de visites protocolaires des chefs amérindiens à Versailles.

L’exposition ne se présente ni d’une manière géographique, ni chronologique. Les artéfacts sont plutôt posés par séries comparatives, et leur présentation est conçue comme un hommage à ces pièces uniques, posées dans un écrin scénographique français rappelant les époques de leur collecte. Il est notamment très intéressant de voir la migration de motifs français sur des techniques autochtones, comme une robe en peau de cerf peinte de tulipes, de perroquets et d’écussons presque baroques. Par ailleurs, on ne peut que s’incliner devant la finesse et la richesse d’exécution des peaux de cerf et de bison tannées avec grand savoir-faire, mocassins brodés avec des aiguilles de porc-épic, calumets, colliers de coquillages, armes de guerre terribles (comme un "casse-tête" à pointe métallique), coiffes à cornes, mocassins griffus et colliers faits de dents de grizzlys.

Ces costumes, ornements, armes et outils proviennent de groupes amérindiens extrêmement variés, comme les Naskapis du Labrador, les Micmacs d’Acadie, les Iroquois, les Ojibwas, les Hurons et les Abénakis de l’est des Grands Lacs et de la vallée du Saint-Laurent, ainsi que d’autres nations comme les Illinois de la vallée du Mississipi et les Quapaws de l’Arkansas.

Jusqu’au 14 octobre
Au musée Pointe-à-Callière
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