Yves Tremblay : L'art actuel dans tous ses états
Arts visuels

Yves Tremblay : L’art actuel dans tous ses états

L’installation Réverbération, présentée au Lieu, est un exemple de la pauvreté esthétique dont sont parfois atteintes les expositions en art actuel. De surcroît, force est de constater que Le Lieu n’a pas réussi, en 25 ans d’existence, à trouver sa voie, ni à s’émanciper des beaux-arts.

L’installation a maintenant plus de 25 ans au Québec. Et depuis que le centre a ouvert ses portes et offre des expositions, on attend encore de voir vers où exactement se dirige cette pratique peu ou prou connue du grand public. Histoire de boucler la boucle, Le Lieu récidive en proposant le plus récent travail d’Yves Tremblay, le premier à avoir exposé une installation au Lieu. Avec Réverbération, l’artiste, qui vit et travaille à Chicoutimi, tente de réfléchir sur les horreurs de la guerre en esquissant "une zone conflictuelle par laquelle se produit la rencontre entre un objet militaire et […] civique". De la civière déformée à la photographie trafiquée, en passant par le parachute qui se gonfle et se dégonfle en fonction de l’activité humaine qui se déploie dans l’espace d’exposition, ce projet est conforme au mot d’ordre de l’art actuel du Lieu, 25 ans plus tard.

Cela dit, ce qui se passe dans l’esprit des installateurs et des performateurs est symptomatique d’une société artistique qui ne sait plus trop quoi faire pour être géniale. Ces artistes, à trop chercher rien et son contraire, ne trouvent des innovations que là où ils ne peuvent qu’emprunter, sans jamais inventer quoi que ce soit, s’inspirant tantôt de la danse et de la poésie, tantôt des sculpteurs, des peintres et des graveurs – qui eux sont les véritables avant-gardistes du XXIe siècle.

Bref, au fur et à mesure qu’ils ont emprunté au théâtre, à la sculpture, à la danse ou à la poésie, les performateurs et installateurs ont oublié d’offrir quelque chose de nouveau d’un point de vue artistique. Certes, ils ont influencé le cinéma et le théâtre. Mais à vouloir tout faire en même temps, à vouloir être absolument tout à la fois et rien complètement, l’installation et la performance ne sont-elles pas devenues, conséquemment, des pratiques marginales? Et est-ce parce qu’elles n’ont pas d’objets propres et de techniques singulières – car elles ne sont que le mélange de plusieurs arts – que l’installation et la performance ont de la difficulté à se trouver un public?

Le résultat de tout cela, c’est qu’en demeurant hybrides, multidisciplinaires, pour ne pas dire transdisciplinaires, les artistes qui ont exposé des installations et fait des performances durant les 25 dernières années ne sont pas toujours parvenus à attirer un public suffisant pour qu’on puisse dire qu’ils ont "amélioré" la société – ce qui doit d’abord et avant tout être la fonction de l’art, c’est-à-dire un facteur de développement social et culturel. A contrario, à l’image de cette exposition anniversaire, la plupart des expositions de type installation et performance sont dépourvues d’originalité et de profondeur. Non pas que les causes que les artistes y défendaient et y défendent aujourd’hui par l’entremise des oeuvres exposées ne soient pas vertueuses – personne ici n’oserait s’opposer à la vertu -, c’est simplement qu’à force d’être constamment en train de rejeter les formes traditionnelles des arts visuels au profit des autres formes d’arts, telles que le théâtre ou la poésie pour ne nommer que celles-là, les dirigeants de l’art actuel de Québec en sont venus à créer une chimère dont les ramifications se font sentir partout ailleurs que dans les arts visuels. Qui plus est, alors qu’ils disent tenir un discours critique et novateur sur le monde, l’on voit les dadaïstes se retourner dans leur tombe et l’on entend Duchamp crier, du haut de son urinoir, au pastiche et au déjà vu.

Jusqu’au 24 juin
Au centre en art actuel Le Lieu
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CARNET

L’ARCHEOLOGIE DU MAÏS

L’exposition Iroquoiens du Saint-Laurent, peuple du maïs, réalisée et mise en circulation par Pointe-à-Callière (le Musée d’archéologie et d’histoire de Montréal), et qui est présentée au Musée de l’Amérique française jusqu’au 9 mars 2008, est composée de plus de 100 objets anciens provenant de sites archéologiques du Québec, de l’Ontario et de l’État de New York.

EN RAFALE

Avatar voyage! L’événement AVATAR. Digitale Poésie, qui se déroulera du 24 juin au 22 juillet en Allemagne dans le cadre du Festival de poésie de Berlin, regroupe cinq artistes: Pierre-André Arcand, Christof Migone, Émile Morin, Jocelyn Robert et Sabica Senez.

EXMURO arts publics, nouvel organisme de diffusion et de promotion des arts et de la littérature, présente son exposition inaugurale Dehors les murs, une série de photographies de Vincent Roy – appuyée par de poétiques aphorismes inspirés – accrochée sur la clôture du cimetière St-Matthew de la rue St-Jean, jusqu’au 22 juin. Une initiative qui vaut le déplacement!