Darren Almond : Derrière l'image
Arts visuels

Darren Almond : Derrière l’image

Darren Almond, artiste londonien qui s’est fait connaître par sa participation à la célèbre expo Sensation en 1997, voit l’un de ses vidéos présentés au MAC. Destination: Tibet.

Je croyais (j’espérais même) que la mode des installations vidéo à écrans multiples soit un peu passée… L’année 2002 semblait être un point tournant dans cette tendance, alors qu’à la Documenta de Cassel, le visiteur se trouvait épuisé par une série interminable de ces installations vidéo à durée variable, mais en fait presque sans fin.

On escomptait alors que ce soit les derniers moments de cette manière de faire (pouvait-on continuer bien longtemps à surenchérir dans cette voie?). Il semble que cela ne soit pas le cas. Un exemple: ces jours-ci, le Musée d’art contemporain projette (en boucle) une oeuvre (récemment acquise) de Darren Almond, projetée sur trois grands écrans. Cette pièce s’inscrit dans un projet plus large de l’artiste, celui de réaliser une série de films (débutée en 1995) sur des trains mythiques. Il en a déjà réalisé deux, sur des trains en Autriche et en Allemagne…

Découvert lors de l’expo Sensation il y a déjà dix ans, avec une installation un peu simple – un immense ventilateur grandissant et devenant trop imposant pour la pièce où il était installé -, Almond (né en 1971) a depuis montré ses oeuvres un peu partout à travers le monde occidental. Même s’il est un des moins forts des Young British Artists lancés à cette époque, il fut néanmoins nommé pour le prestigieux Turner Prize en 2005.

MONTER A BORD

Malgré la beauté de certaines images et effets, ce vidéo, intitulé In the Between, a du mal à faire embarquer le spectateur dans son parcours visuel. En fait, je ne me suis vraiment pas senti touché. Cela tient-il au fait que le cinéma narratif nous a imposé une manière de lire l’image? Certes, dans les films en salle, ce n’est pas que l’image qui touche, mais aussi la narration. Dans beaucoup de vidéos d’art, comme celui-ci, cette narration est réduite à sa plus simple expression… C’est peut-être une explication, mais j’en doute. Matthew Barney, qui lui aussi raconte très peu de choses dans ses films, y insuffle pourtant une grande intensité visuelle. Dans cette oeuvre d’Almond (comme souvent chez cet artiste), il y a une certaine froideur qui n’arrive jamais à être sauvée par la richesse des images.

Pourtant, le sujet de ce film est impressionnant, et tous les ingrédients pour passionner le spectateur sont là. Cette ligne de chemin de fer, ouverte en juillet 2006 et qui relie Xining en Chine à Lhassa au Tibet, est la plus haute du monde (elle culmine à plus de 1500 mètres au-dessus du niveau de la mer). Son ouverture fut très contestée, certains y voyant un risque pour la culture tibétaine, ce pays (envahi par la Chine en 1949) se trouvant ainsi plus facile d’accès pour le gouvernement chinois. Mais il semblerait bien qu’un excellent sujet, même aussi important que celui-ci, ne fasse pas toujours une bonne oeuvre. Si le spectateur ne connaît pas le récit entourant la construction de ce chemin de fer, il ne restera qu’un simple touriste se promenant dans un train et contemplant au passage quelques scènes captées dans le monastère de Samye.

Jusqu’au 8 juillet
Au Musée d’art contemporain
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