La Nouvelle Fabuleuse : Réécrire l’histoire
La première de La Nouvelle Fabuleuse ou Les Aventures d’un Flo aura lieu en fin de semaine. Entretien avec Michel Marc Bouchard, le dramaturge qui aura réécrit l’histoire.
Lorsque vient le temps de rénover un monument aussi respecté que celui de La Fabuleuse Histoire d’un Royaume, qui avait à sa solde 20 ans d’émerveillement et une réputation nationale, pas facile de savoir où donner de la tête. La tâche ne pouvait qu’être ardue pour Michel Marc Bouchard, qui signe le texte de La Nouvelle Fabuleuse ou Les Aventures d’un Flo. Le dramaturge devait en effet rendre hommage à la réputation du spectacle original et se respecter lui-même. "C’est un processus étrange. Je ne suis quand même pas un concierge de spectacle, je ne suis pas là pour arranger ce qui ne va pas ou améliorer ce qui est bon. Je leur ai dit: "Je veux les coudées franches. Je veux écrire mon poème à moi pour la région!"" Difficile aussi parce que, forte de ses deux décennies d’évolution, la production originale avait été revue et corrigée à plusieurs reprises, se développant à la manière d’un palimpseste qu’il fallait effeuiller délicatement. Enfin, il faut dire que le concept ne ressemblait à aucune autre création: "Ce qui est un peu étrange, c’est que je n’ai pas nécessairement l’habitude de ces écritures-là. Il fallait que je comprenne comment ça s’écrivait, tout ça. Ce n’est pas du théâtre, ni de l’opéra, ni de la comédie musicale… C’est tout ça à la fois."
Hybridation de tous les arts de la scène et du jeu, le concept a d’ailleurs été pourfendu maintes fois par certaines gens de théâtre qui lui reprochaient, justement, de ne pas être du "VRAI théâtre". À cela, Bouchard répond du tac au tac: "Il faudrait toujours que quelqu’un dans le milieu théâtral m’explique c’est quoi, du vrai théâtre. Robert Lepage pourrait dire c’est quoi, du vrai théâtre, autant que Denis Marleau, autant que Michel Tremblay pourrait le dire… Il existe plein de théâtres."
COMME AU CINEMA
"Dans la Fabuleuse, ce qui est, je dirais, le cadeau, et en même temps la béquille, c’est la narration. Pour moi, il fallait écrire une narration que Serge [Denoncourt, metteur en scène] allait illustrer." Ce qui n’est pas sans rappeler un travail de scénarisation…
Ce rapprochement avec la création cinématographique va plus loin qu’une simple coïncidence. Le texte a même pris des allures de scénario: "La première des choses que le metteur en scène fait au théâtre, c’est de couper les indications scéniques. Alors que là, au contraire, on les respecte énormément, comme un scénario de film. J’ai à travailler avec l’image… C’est l’ombre d’un scénario de film." À cela s’ajoute une trame sonore "très cinématographique", écrite par Dominique Laprise et orchestrée en instruments originaux.
L’EMOTION DEPLOYEE
"Le plus grand défi pour moi, c’était d’écrire à nouveau une histoire, quatre siècles en deux heures et quart, parce que, étant de la région, et extrêmement chauvin, j’aurais pu faire ça sur cinq heures facilement…" finit-il d’un rire étouffé. "Aussi, je tenais à ce qu’il y ait une rigueur historique. J’ai voulu un peu travailler mon personnage comme Candide, de Voltaire, ou encore comme L’Odyssée d’Homère, je voulais qu’il soit partie prenante des événements historiques."
Ce n’est pas la première fois que Bouchard fait montre d’un intérêt marqué pour l’histoire. Rappelons qu’il était le fer de lance du projet du Musée Louis-Hémon, à Péribonka, et qu’il a aussi été maître d’oeuvre d’expositions historiques et thématiques, collaborant avec différents musées du Québec et de la France. Pour l’écriture des Aventures d’un Flo, c’est Jérôme Gagnon, doublé de l’appui des archives de la Société historique du Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui a alimenté ses propres connaissances de l’histoire régionale. "Mon dernier projet, ça a été Louis-Hémon, mais même dans mes pièces il y a des cadres historiques. Je trouve que l’histoire rend parfois les choses un peu moins anecdotiques."
Mais au-delà de l’histoire, c’est surtout l’émotion qui sera au rendez-vous. L’effort mis en oeuvre par Bouchard visait entre autres à impliquer plus fortement le spectateur dans les événements relatés. "J’ai tenté de faire en sorte qu’il y ait un personnage principal, mais aussi ses proches, qui vont vivre et subir les grands événements." Exit les grandes pétarades et plusieurs des effets spéciaux dont l’effet commençait à être usé. "Je dois dire que c’est très émouvant. On a préféré l’émotion aux pétards et aux fontaines… Mais on a nos technologies à nous. Il y a plein de surprises… Il y a de la magie là-dedans." Ce sur quoi il refuse bien sûr de s’avancer.
C’est somme toute une très agréable expérience que semble avoir vécue le dramaturge, qui remercie d’ailleurs les organisateurs du Palais municipal: "Ils y croient tellement! On n’a jamais vécu de censure, au contraire, ils nous ont donné des ailes! Pour un projet comme celui-là, j’ai été étonné, et ravi, je dois l’avouer. Ils ont vraiment supporté la dramaturgie." Une liberté dont on peut enfin voir le résultat…
La Nouvelle Fabuleuse ou Les Aventures d’un Flo
Dès le 29 juin
Au Palais municipal de La Baie
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