Ronald Thibert : Le Souci du détail
Ronald Thibert présente, au Centre national d’exposition, des sculptures sur bois inspirées par les plus grands.
Ils ont littéralement fait l’histoire. Les Rodin, Rubens, Vinci, Le Caravage, Rembrandt, Botticelli… Le travail de ces grands artistes prend une nouvelle dimension avec les oeuvres de Ronald Thibert, présentées au Centre national d’exposition. Étudiées dans le détail à partir de reproductions, elles reprennent un galbe que le transfert en deux dimensions avait aplati, émergeant du coeur d’immenses pièces de bois.
En effet, Ronald Thibert a isolé des parties d’oeuvres ayant marqué l’histoire de l’art pour les reproduire en taille directe, à même des poutres de bois massif. Ici, le dos musculeux d’un personnage issu d’une Étude de nu pour l’Adoration des mages (Rubens); là, un baiser sur le front du Christ qu’on retrouve sur La Pietà de Botticelli; là encore, le poing enchaîné de Jésus sur la croix, extrait d’une oeuvre de Rembrandt…
De la deuxième à la troisième dimension, la métamorphose n’est pas qu’accessoire. Non seulement le détail se voit gonflé d’une texture qu’il n’a peut-être jamais eue, mais l’attention qui lui est nécessairement apportée provoque du coup l’effacement du reste, laissant sombrer l’environnement original du tableau dans le néant de l’Histoire. Détaché de l’oeuvre première, le détail prend soudainement une dimension particulière qui n’est certainement pas que physique.
Ce détail que l’artiste a choisi d’isoler de son cadre premier garde nécessairement un rapport avec l’oeuvre originale, lui apportant, avec l’acuité de ce regard neuf, une portée universelle. Ce poing enchaîné sur la croix, par exemple, ne rappelle plus seulement le dévouement du Christ, mais tous les sacrifices qui ont ponctué l’Histoire, redonnant ainsi son sens premier au sacrifice ultime du fils de Dieu. C’est le même processus de lecture qui se produit avec toutes les sculptures de Thibert, obligeant le visiteur à jeter un regard neuf sur ce qui, autrement, serait peut-être passé inaperçu.
C’est littéralement un temple de la renommée de la peinture que structure Ronald Thibert dans l’espace d’exposition. Les sculptures, comme d’immenses poutres alignées en deux rangées, rappellent par leur disposition les colonnes à la fois massives et fragiles de ces sanctuaires mythiques qui hantent notre imaginaire. Au fond de la nef de ce temple étrange, encadré par les piliers déséquilibrés qui s’appuient lourdement sur les murs du musée, le Repas montre le visage de Jésus flanqué de ceux de ses apôtres, aussi en taille directe, comme incrustés dans la niche de leur matériau propre. Pour chaque homme réuni dans le cadre de cette nouvelle Cène, l’artiste a trouvé une essence – un Jésus imberbe au centre de cette assemblée, sous les mains de Thibert, est en noyer cendré.
Et dans l’arrière-scène se dévoile, pour les visiteurs les plus curieux, la technique de transfert utilisée par l’artiste. Pour chaque oeuvre, on trouvera une reproduction de son tableau ou de sa sculpture originale, recontextualisant chacune des pièces de Thibert. C’est l’histoire de l’art qui se joue à l’occasion d’une telle visite.
Jusqu’au 9 septembre
Au Centre national d’exposition
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