Sulpiciens : Tableau d'époque
Arts visuels

Sulpiciens : Tableau d’époque

Vous connaissez les Sulpiciens? Peut-être mal. Pourtant, ils ont eu une influence considérable sur la vie et les arts au Québec. Remémoration.

À notre époque où le religieux refait surface avec force, dans notre société québécoise où l’on a bien du mal à se libérer des dernières influences du catholicisme (comme le crucifix à l’Assemblée nationale et les cours de religion à l’école) et où il est de bon ton de dire que le temps où l’Église dominait avait finalement, après tout, beaucoup de bons côtés (ah, le bon vieux temps!), voici une présentation qui tombe à point. L’exposition dédiée à L’Héritage artistique des Sulpiciens de Montréal, qui se tient ces jours-ci au Musée des beaux-arts (MBA), permettra de réfléchir à l’impact de la religion dans les sociétés et dans la nôtre en particulier.

Présente au Québec depuis 350 ans, la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice, qui avait été fondée au lendemain de la Contre-Réforme (en 1645) pour lutter contre les méchants protestants, s’en est allée de l’autre côté de l’océan, dans le cadre de l’ordre de la Société de Notre-Dame de Montréal, pour effectuer la conversion "des Sauvages de la Nouvelle-France". Beau programme… Ces Sulpiciens contrôlèrent pas mal la vie culturelle d’ici (par exemple, avec la création en 1844 d’une bibliothèque, L’OEuvre des bons livres, afin "d’opposer une digue aux mauvaises lectures"!). Mais bon, ils auraient néanmoins apporté beaucoup aux arts, à l’architecture et à la musique d’ici…

BILAN POSITIF?

Pourtant, à voir cette expo, je ne peux que conclure à un héritage très mitigé. Vous y retrouverez souvent le pire et parfois le meilleur. Dans cette présentation, vous verrez des portraits d’abbés très maladroitement exécutés, des vêtements liturgiques fastueux et pompeux, la maquette pour le très médiocre et très enfantin retable de Charles Daudelin pour la chapelle du Sacré-Coeur… Mais bon, il y a aussi quelques pièces superbes, même si elles sont parfois très conservatrices pour leur époque. La Statue de la Vierge à l’enfant, faite en France en argent et en bois peint au 17e siècle, est merveilleuse, tout comme ce Crucifix sur pied (étrangement d’une grande sensualité), qui date de la même époque. Très intéressants sont aussi les sculptures de Louis-Philippe Hébert représentant Ézéchiel et Jérémie (datant de 1883 et 1884) ou les dessins de Napoléon Bourassa, et ce, même si le travail de ces artistes est très académique et très décalé par rapport à l’art européen qui se faisait à la même époque.

Certes, le commissaire Jacques Desrochers a fait un excellent travail (qui s’amplifie dans sa participation à l’ouvrage Les Sulpiciens de Montréal, publié en début d’année aux éditions Fides). Les oeuvres sont superbement présentées, mais le sujet manque souvent de grandeur esthétique. Qu’y faire? Nous ne pouvons pas réécrire l’histoire…

Une occasion de découvrir l’église Erskine and American, qui fera partie d’un nouveau pavillon du MBA dédié à l’art canadien. Signalons que le MBA est totalement gratuit cet automne.

Jusqu’au 9 décembre
Au Musée des beaux-arts
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