Robyn Moody : Les illuminations
Robyn Moody, artiste vivant dans l’Ouest canadien mais originaire de la Nouvelle-Écosse, nous convie à un petit théâtre de l’émerveillement. Voyage spatio-temporel.
L’art a toujours eu des envies de spectaculaire. Et l’art moderne ou postmoderne n’y a pas échappé avec les sculptures monumentales de Richard Serra, les animaux découpés et placés dans le formol de Damien Hirst, la Robe de viande de Jana Sterbak…
Depuis plusieurs décennies ont proliféré des installations imposantes ayant pour but de procurer des expériences sensorielles déstabilisantes, voulant concurrencer celle de la nature. Mais depuis quelques années, nous avons droit à du spectaculaire étrangement intimiste, au développement d’une esthétique du petit émerveillement. Par exemple, le public montréalais se souviendra de la scintillante installation de Diane Morin (l’an dernier chez Optica), sorte de menue caverne papillotante, plongée dans le noir, où des flashes de lumière venaient dérouter l’oeil du spectateur en dévoilant des images d’objets du quotidien.
Le Calgarien Robyn Moody nous invite lui aussi dans un petit théâtre, celui que le centre Skol est devenu sous sa main. Vous pourrez y assister à la présentation (représentation?) en deux parties de sa mise en scène. Les deux oeuvres installées, l’une visuelle et l’autre avant tout sonore, se complètent et s’amplifient avec une grande justesse.
Dans Constellation, vous serez plongés dans une obscurité aveuglante qui vous fera perdre vos repères spatiaux. Vous vous avancerez alors lentement et découvrirez une salle pleine de petites lumières installées à différentes hauteurs et qui composent un ordre calculé. Ce sont simplement des voyants lumineux comme on peut en retrouver dans bien des appareils électroniques de nos jours. Mais Moody, avec ces éléments on ne peut plus simples, arrive à créer une atmosphère très consistante. Cela fait penser au spectacle qu’offre une ville la nuit d’un point de vue élevé ou à un ciel étoilé. Paradoxalement, le spectateur se sent à la fois comme un géant pouvant s’emparer de cette ville endormie et comme une fourmi contemplant l’immensité de l’univers. Une installation qui rappellera la photo de Nicolas Baier Noire nuit (datant déjà de 2001), montrant dans l’absolue obscurité d’un appartement les différentes lumières des appareils électroniques qui comme des veilleuses brillent ici et là. L’espace intime de nos appartements y rencontre l’infini du monde. Vous vous croirez revenu en enfance, rêvant au cosmos, couché dans votre petite chambre.
Cette merveilleuse installation de Moody est accompagnée d’une machine sonore intitulée TARDIS (acronyme pour Time And Relative Dimensions In Space). Il s’agit d’un tourne-disque adapté, accouplé d’un métronome, qui fait entendre des extraits de la célèbre pièce musicale The Planets de Gustav Holst. Cette machine nous fait passer abruptement de Mars à Jupiter ou de Saturne à Uranus… Le titre de cette oeuvre fait référence à la machine à voyager dans le temps dans l’émission de science-fiction Doctor Who. Grâce à ce parallèle, Moody tisse un lien entre l’art contemporain et le domaine du féerique. Voilà une tendance très actuelle qu’il s’approprie avec une grâce certaine. Il faudra surveiller cet artiste attentivement.
Jusqu’au 9 février
Au Centre des arts actuels Skol
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L’art qui tisse des liens avec le théâtre