Emmanuelle Léonard : Images du temps présent
Un solo d’Emmanuelle Léonard et une expo collective, avec entre autres Martin Verreault, Roger Proulx et Caroline Hayeur, montrent à quel point la photographie est active au pays.
Alors que l’expo de peinture de Marie-Claude Bouthillier (au Centre Clark), intitulée Apparitions, nous montre des tableaux inspirés de l’iconographie de la Vierge Marie, voilà que se tient le solo L’Annonciation de la photographe Emmanuelle Léonard. Y aurait-il à nouveau un retour vers la religiosité en art contemporain?
Léonard ne nous avait pas habitués à une telle approche, elle qui fait plus dans le documentaire que dans la fiction. Or, tout comme Bouthillier, elle ne fait pas nécessairement des images religieuses, mais travaille sur la structure représentative de la foi, mettant ici en scène la tension des images montrant l’Annonciation. Vous connaissez bien sûr ce type de représentation: d’un côté, l’ange Gabriel descend du ciel pour dire à la Vierge qu’elle a été choisie et de l’autre, celle-ci se fige dans une pose signifiant la surprise devant le merveilleux de l’incarnation (et de l’enfantement). Entre les deux, il y a toujours un espace vide, occupé par une lumière, celle de Dieu.
Dans cette expo, Léonard nous dévoile quatre nouvelles photos qui entretiennent elles aussi une tension narrative. D’un côté, vous serez appelés par deux images d’animaux, une louve et un aigle, avec toutes les connotations que ces deux bêtes possèdent (animalité, force…). De l’autre, vous verrez deux paysages sous la neige, protégés par une nuit étoilée, des vues de deux prisons pour femmes au Québec (Joliette et Tanguay), où, dans les deux cas, les prisonnières peuvent parfois accueillir leurs enfants. Ces images ne seront pas sans évoquer la Nativité (en particulier celle où une petite maison fait penser à la grange dans laquelle Marie a donné naissance au Christ).
Entre les deux, un écart, entre fiction et réalité, image symbolique et image du monde concret. De plus, comme l’ajoute Léonard, cette expo "oscille entre protection et enfermement". Une présentation qui parle certainement de la maternité, de son statut particulier en société, sacralisée par la religion – qui s’en est aussi servi comme outil de répression contre les femmes? Malheureusement, le contexte symbolique de cette expo ne semble pas si clair. Je dois dire que j’aurais aimé voir plus d’images des prisons, Léonard excellant à parler de la vie et du quotidien. Ses deux photos du milieu carcéral sont d’ailleurs impeccables. Jusqu’au 24 mai, à la Galerie Donald Browne.
BIENVENUE
Dans son premier projet en tant que commissaire, le photographe Gunther Gamper nous montre, lui aussi, que le médium photo se porte bien de nos jours. Dans son expo intitulée Bienvenue, il nous présente la vision de 10 créateurs sur le thème du domicile. Celui-ci est montré comme lieu de souvenirs (troublants) de l’enfance dans les images intenses de Martin Verreault, comme reflet d’un monde intérieur angoissé chez Roger Proulx (qui évoque totalement l’atmosphère du film Continental). Caroline Hayeur nous dévoile des images intimes et presque dérangeantes de sa famille et de ses amis lors d’échanges vidéo sur Internet, une manière de nous dire comme l’intime est en train de se reformuler. Ces créateurs sont accompagnés de Sébastien Cliche, Bettina Hoffmann, Birthe Piontek… Des artistes de haut niveau. Jusqu’au 7 juin, à la maison de la culture Frontenac.
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Léonard – Gamper