Chih-Chien Wang / Isabelle Hayeur : Entre-temps
Première expo de Chih-Chien Wang et Isabelle Hayeur chez Pierre-François Ouellette Art Contemporain. Une galerie extrêmement dynamique.
À la mort de la galeriste Thérèse Dion l’automne dernier, trois de ses artistes furent rapidement repêchés. Roberto Pellegrinuzzi, Isabelle Hayeur et Chih-Chien Wang font maintenant partie de l’équipe (déjà très forte) de Pierre-François Ouellette. Dans l’arène de l’art québécois, où il n’y a pas assez de galeries sérieuses pour représenter nos artistes (qui, eux, sont de haut niveau en grand nombre), voilà une bonne chose. Plusieurs autres artistes de chez Dion mériteraient pareil destin (Alexandre David, Paul Litherland, Josée Pedneault…). Dion avait l’oeil. Vous pourrez en juger en examinant, dans leur nouvelle galerie, les oeuvres d’Hayeur et de Wang.
Hayeur expose un diptyque, deux paysages qui se font face. L’un montre un monde désertique, l’autre, un site habité, couvert par la végétation et une étendue d’eau. En fait, il s’agit du même paysage, bâti et trafiqué par Hayeur. Une apologie du pouvoir de l’homme moderne qui peut transformer un lieu aride en zone habitable? Ou, à l’inverse, une critique des actions irréfléchies de nos sociétés qui ont enclenché le réchauffement planétaire? Ces images évoquent un sentiment issu de cette croyance moderne qui veut que l’homme ait la faculté d’intervenir, comme un dieu, sur le monde afin de l’améliorer. Au 19e siècle, à la suite des travaux d’Haussmann, Delacroix écrivait ne plus reconnaître Paris, des boulevards apparaissant là où il y avait des petites rues et des arbres adultes transplantés se présentant comme s’ils avaient poussé depuis des décennies en ces lieux. C’est de cette sensation étrange que parle Hayeur. Une idée qui n’est donc pas nouvelle, mais qui est ici très bien illustrée.
Wang, quant à lui, propose des mini-paysages issus du quotidien. Dans une photo, vous verrez un amoncellement de fragments de cosses de pois mange-tout, dans une autre, un papier couvrant une aubergine… Le vidéo (sur trois écrans) qui accompagne ces photos dure 24 minutes, le temps qu’il lui a fallu pour préparer ces pois mais aussi, en parallèle, pour transcrire un rêve mettant en scène sa mère. Un travail sur la mémoire et l’héritage culturel. Il y a chez Wang, dans le contenu et dans la forme, une grande élégance, pas du tout superficielle comme elle l’est souvent dans la société et l’art bourgeois.
Jusqu’au 23 août
À la Galerie Pierre-François Ouellette
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