Erwin Wurm : Le pari du ridicule
Erwin Wurm, artiste pince-sans-rire, sévit à la Galerie de l’UQÀM. Mettez de côté toute forme de vanité et allez jouer le jeu de ses oeuvres irrévérencieuses.
C’est une exposition participative, presque interactive. Mais ne vous attendez pas à y trouver des bébelles technologiques. Ici, vous aurez droit à un vieux canapé troué, quelques balles de tennis usées… Et c’est très bien ainsi. L’Autrichien Erwin Wurm ne fait pas dans l’oeuvre imposante. Il travaille plutôt à ridiculiser toute forme de prétention, d’ego, de suffisance ou de consécration.
Une des premières oeuvres exposées est une photo de lui-même, à genou, un citron dans la bouche, intitulée The Artist Begging for Mercy. Il semble s’y repentir de je ne sais quelles fautes (péché d’orgueil?). Le ton est donné. Dans le reste de l’expo, Wurm vous invite très souvent à participer à ses oeuvres, à collaborer (momentanément) à ses sculptures dont vous deviendrez les antihéros. Pour plusieurs des pièces présentées, un petit texte explique ce que vous devez faire afin de ruiner votre ego. Vous pourrez vous mettre la tête dans un frigo, vous placer une bouteille de récurant à toilette sur la tête…
Plusieurs de ces oeuvres traitent de la notion d’équilibre. Ici, Wurm vous demande de vous tenir la tête en bas sur un gros coussin (et de penser à Freud); là, il vous propose de vous allonger sur des balles de tennis sans qu’aucune partie de votre corps ne touche au sol (en ne pensant à rien cette fois)… Chaque station parle du corps, de la posture de celui-ci en société. Wurm tente de défaire la manière habituelle que nous avons d’être dans nos corps, d’arracher notre costume social. Encore une oeuvre postmoderne humoristique? Oui, mais cette fois, elle doit être prise au sérieux… Elle n’est pas qu’un énième clin d’oeil pseudo-ironique à la culture populaire (à la Jeff Koons).
L’exposition Désespéré, montée par le commissaire Patrice Duhamel, regroupe des pièces ayant des liens avec la philosophie. Elle est à la fois une critique négative d’une approche trop dogmatique de certains penseurs et une reconnaissance de l’impact des idées sur nos manières d’être. Elle est surtout une reconnaissance de la philosophie comme position critique qui change radicalement le point de vue que nous avons sur le monde (et nos manières de vivre). Quitte à apparaître ridicule.
À voir si vous aimez /
Mathieu Beauséjour, Peter Land