Cécile Holveck : Du vain et des jeux
Avec le travail de Cécile Holveck présenté à Langage Plus, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme.
Sur le trottoir, devant Langage Plus, les immenses vitrines du centre d’artistes révèlent déjà l’essentiel de l’exposition. Bâtir sur le vent regroupe des formes immenses et de toutes les couleurs, prismes vides empilés et tiges enchevêtrées. Tandis qu’on s’avance parmi les structures simples, la lumière du jour ennoie l’espace comme on s’attendrait de le voir dans un jardin d’enfants.
Toutefois, il ne s’agit pas d’un travail à voir, mais à jouer. L’artiste strasbourgeoise Cécile Holveck, dont la présence en ce centre est liée au programme de Résidences croisées Alsace, France/Lac-Saint-Jean, Québec, propose une expérience ludique, mettant l’accent sur la faculté créatrice des visiteurs. Ces derniers, lors de leur passage, sont invités à modifier les installations en jouant avec les différents volumes géométriques présentés. S’amorce une négociation sans finalité entre la forme, l’espace et le visiteur.
Ainsi, l’artiste abandonne une partie de son rôle au profit de ceux qui joueront le jeu: les structures attendent d’être modifiées, tendues vers cette évolution. C’est justement cette impermanence formelle qui parfume le vent sur lequel l’artiste nous invite à bâtir, avec ce jeu de construction géant, des architectures instables vouées à une perpétuelle redéfinition.
Sans être réducteurs, les procédés mis de l’avant par l’artiste rappellent l’univers du jeu enfantin, jamais banal, qui est déjà un art en soi: il consiste en un processus de recherche, d’appropriation et de création de la réalité. En perpétuelle invention, l’esprit enfantin en vient à se raconter un chapelet d’histoires possibles ou impossibles, desquelles il est le héros, et qui transforment des pans de son monde.
C’est sans doute inspirée par cette propension au récit que l’artiste a choisi de présenter de courts textes imprimés. Ici, on lira un conte fantastique, et là, le souvenir touchant d’une collation avec grand-mère – et des odeurs de pommes qu’on arrive presque à sentir… Ces récits sont accompagnés de dessins figuratifs qui contrastent avec la pureté des lignes des volumes qui encombrent la salle, et pourtant pas tout à fait; on trouve parfois un rappel formel qui crée un lien indéniable entre le 3D et le 2D.
C’est aussi, et peut-être surtout, le côté vain du jeu – et celui de l’art, sans doute – qui est mis en scène. L’oeuvre, qui accueille la participation du public, n’est jamais totalement terminée, n’aspire pas à la perfection. Même les agencements les plus réussis devront faire face à leur destin, dès lors qu’un autre visiteur franchira la porte…
Il se lève un vent nouveau entre les murs de Langage Plus alors que nous découvrons le travail d’une artiste qui a refusé de prendre les chemins de la facilité en arrivant au Québec. C’est sur ce même souffle que doit bâtir le centre d’artistes pour les prochaines résidences croisées qui nous feront découvrir des créateurs français.
À voir si vous aimez /
L’art participatif, la sculpture, les couleurs franches