Méchant Moineau : Trou de mémoire
Méchant Moineau, une exposition ébouriffante de Michel Houde, revisite la mémoire ainsi que les "parlures" québécoises.
Artiste autodidacte, Michel Houde embrasse large. Il s’exprime autant par l’entremise de l’écriture, de la peinture que de l’assemblage. Ses oeuvres atypiques, dont 200 sont réunies au Musée québécois de culture populaire, font tantôt sourire, tantôt grincer des dents. Mais elles ont toutes un point commun: elles suscitent la réflexion.
Rencontré le jour du vernissage, le Sherbrookois raconte que cette aventure artistique a d’abord commencé par un dessin, puis un livre qu’il a intitulé Être humain, mode d’emploi. "C’est un livre sur nous autres, sur comment ça marche cette bête-là. C’est l’aboutissement d’une réflexion qui a pris à peu près 20 ans. À force de lire sur la religion, sur la méditation, sur la philosophie orientale, sur comment l’être humain s’est développé au fil du temps, j’ai conclu qu’on est juste le produit de notre mémoire, comme un ordinateur. Dans mon concept, si tu perds complètement la mémoire, tu n’as plus aucune identité, plus d’émotions, plus de sentiments: tu es une roche. À force de tourner à l’entour de ce concept-là, les mots n’avaient plus assez de substance pour expliquer ce que j’avais à dire, donc le symbole s’est imposé."
Le symbole, le planificateur financier de profession l’exploite dans une série de dessins et de toiles qui occupent une bonne partie de l’exposition Méchant Moineau. "Pour moi, nous ne sommes que de la mémoire symbolique. On est juste du code appris. Tu arrêtes à un feu rouge, tu pars à un feu vert: c’est un code. Un ordinateur, c’est strictement du code. Le langage, ce n’est que du code. Tout n’est que du code. Donc on a emmagasiné ça dans notre boîte, pis on vire en rond."
Avec les sculptures les parlures, des idiomes, Houde cherche à enrayer ces conditionnements. Par exemple, il donne un sens nouveau à l’expression "s’être fait poser un lapin" ou "péter de la broue". Certaines sculptures, avec leur humour noir, risquent d’ailleurs de secouer un peu: De la graine de bandit (des sexes masculins et un pistolet poussant dans un pot à fleurs) et Bloody Mary (une poupée dont on extrait le sang). Le Musée se sent-il à l’aise avec ça? "Il y avait des oeuvres beaucoup plus percutantes qu’on n’a pas exposées parce qu’elles étaient trop dérangeantes. Si on fait référence à "graine de bandit", je trouve que c’est un petit peu osé, mais en même temps, ça fait du bien d’avoir des choses qui nous dérangent. Et la qualité de cet artiste-là et de ses oeuvres, c’est que ça suscite des réactions. Ce n’est pas une exposition qui est ennuyante!" s’exclame Nathalie Gascon, chargée de projet.
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