Stigmat photo : Visages privés
Stigmat photo, un collectif de photojournalistes, s’expose en projections au Cercle. En vue de cette exposition, j’ai rencontré Larry Rochefort, qui m’a entretenu sur leur travail.
"Sans être idéalistes ou naïfs, nous avons l’espoir de changer le monde avec notre photographie." C’est ce qu’affirme Larry Rochefort quand il me raconte l’histoire de Stigmat photo, collectif fondé il y a deux années et dont quelques membres sont d’actifs collaborateurs de Voir. "Mais attention, il ne s’agit pas uniquement pour nous de sensibiliser les gens d’ici en présentant nos oeuvres. On s’intègre en douceur aux communautés locales que nous visitons pour les aider concrètement. Par exemple, lors de mon dernier voyage en Palestine, j’ai enseigné la photo à des jeunes, puis nous avons mis sur pied une exposition itinérante là-bas." À mesure que la noblesse s’installe dans les propos de mon interlocuteur, je me trouve assailli de solutions à des questions qui hantent beaucoup d’artistes actuels. Balayée la "surthéorisation" de l’esthétique relationnelle, il reste l’"utilité" de l’art, qui vient ici par l’implication directe de l’artiste.
"Par ailleurs, notre travail est simple et s’inspire des grandes lignes du photojournalisme: présence humaine dans la majorité des clichés, véracité des sujets, aucun recadrage pour préserver l’originalité de la prise de vue, une image donnant un maximum d’informations", souligne Rochefort. "Stigmat cherche aussi une cohérence visuelle d’ensemble, sans pourtant brimer les esthétiques individuelles de chacun des cinq photographes. Ainsi, au-delà de la technique à maîtriser pour arriver à une photo idéale, on veut surtout capter le vrai visage des gens. Par exemple, il peut arriver, lorsque l’on s’intègre à une communauté, de ne pas sortir l’appareil photo avant deux semaines. Puis, un cliché furtif et un autre, jusqu’à ce que les gens oublient la prise d’images. C’est là qu’ils montreront ce "visage privé" (Kundera), dénué d’artifices mais touchant d’humanité."
Le groupe s’est récemment enrichi de nouveaux collaborateurs internationaux (d’autres collectifs français, belge et roumain), avec qui il prépare une grande exposition itinérante qui fera une halte à Québec en fin de parcours. D’ici là, rendez-vous le 9 novembre à 14h, au Cercle, pour partager avec les photographes leur vision lucide.