Martin Bureau : L'apocalypse selon Martin Bureau
Arts visuels

Martin Bureau : L’apocalypse selon Martin Bureau

Sera présentée jusqu’au 10 mai la suite de tableaux paysagistes cataclysmiques de Martin Bureau, Le Fleuve empaillé. Un petit traité d’eschatologie quotidienne à méditer, chez Lacerte.

En tout, plus d’une dizaine de pièces en phase avec la fascination d’une époque dont la marche semble réglée par la surmédiatisation des tragédies. On y trouve l’urgence d’une pratique engagée assortie d’une vision teintée d’une américanité inévitable, suggérée par l’imagerie militaire et son cortège paranoïde dans la suite du 11 septembre. Mais aussi, la surprise de voir l’inscription de ces morceaux dans le grand "paysage des événements" et de l’art actuel sans sacrifier sa couleur locale, soutenue par une ligne d’horizon commune, celle du fleuve Saint-Laurent.

D’abord, il y a partout cet amalgame à l’huile et à l’acrylique qui est assez singulier. Techniquement, et c’est toute la beauté de ces oeuvres, on y sentira des moments de doute significatifs. Dans certains morceaux comme Le Sursis, Martin Bureau tire profit d’une hésitation pour se reposer aux certitudes d’un crépuscule qui frôle les manières de la peinture dite commerciale. Un recul lucide qui, une fois assumé, devient un élan pour le plongeon risqué qu’était La Persistance d’un battement d’ailes. Présentant les écrasements emmêlés d’un Boeing et d’une oie sauvage, ce pentaptyque intègre l’ensemble des recherches picturales des autres pièces en y ajoutant l’originalité et la force narrative d’une frise chronologique. Avec ses coups de spatule donnés dans la peinture en séchage, suggérant le flou du mouvement, Bureau est à son meilleur. Y entendez-vous siffler certaines notes dissonantes de Francis Bacon, Jean Paul Lemieux ou Riopelle? Le peintre m’expliquait que s’ils sont là, en sourdine, c’est plus un "accident de parcours" qu’une volonté délibérée de les convier dans son oeuvre.

Pour conclure et paraphraser Paul Virilio, si "le krach actuel représente l’accident intégral par excellence", la peinture de Martin Bureau est un reflet de cette même réalité. Si bien que le saut de l’ange de cette possible "catastrophe sur 25 pieds" sera évité de justesse et magnifié… par sa réussite. N’oubliez surtout pas de vous procurer le splendide catalogue.

À voir si vous aimez/
L’Hommage à Rosa Luxembourg, Gwenaël Bélanger, la neige et les glaces aux pôles qui fondent sans distinction

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TOUR D’HORIZON

Vous préférez des avions qui ne s’écrasent pas? Vous aimerez le Centre d’interprétation historique de Sainte-Foy avec sa rétrospective Dans le ciel de Québec: cent ans d’aviation. Déjà en cours, elle se poursuit jusqu’au 20 décembre. Autre endroit calme tout près de là, la Maison des Jésuites de Sillery présente son Hommage aux communautés religieuses de Sillery, jusqu’au 21 décembre. Mais si vous voulez voir des oeuvres pas très gentilles, allez plutôt à La Cuisine (le 23 avril) et à la Galerie Tzara (le 24 avril) pour deux vernissages en formule 5 à 7. Le premier de Marie-Kim Lavigne pour son exposition intitulée HD Vision, le second pour Je me souviens donc je suis de Catherine McInnis.