Femmes artistes. La Conquête d’un espace: 1900-1965 : D’un doigt, montrer la lune
Esther Trépanier, directrice du MNBAQ, vous invite à titre de commissaire à voir le tribut de ses propres découvertes avec Femmes artistes. La Conquête d’un espace: 1900-1965.
Y sont rassemblées une cinquantaine d’oeuvres, tirées de la collection du MNBAQ, d’une période qui coïncide avec la conquête de plusieurs espaces dont l’accès fut longtemps refusé aux femmes. Conquête des espaces public, sociopolitique et artistique par la prise de parole, la montée des féminismes avec, à la clé, l’accession au droit de vote et au pouvoir.
Une exposition où on trouve de très bons morceaux qui font sentir l’importance capitale des femmes dans l’art au Québec. Sans clichés ni gentillesses et dans une disposition aérée, on croise l’intimisme et les portraits de Suzanne Duquet, Jori Smith, les scènes pastorales ou les paysages (Anne Savage), le constat social (Ghitta Caiserman-Roth, Sylvia Ary) et, pourquoi pas, les fleurs. Mais quelles fleurs que celles de Marian Scott!
En fait, les divisions et les cartels font surtout état des apprentissages et des statuts de ces créatrices, des thématiques qu’elles ont explorées, des groupes auxquels elles ont appartenu. D’ailleurs, puisque l’événement actuel se lie aussi à l’histoire du Musée (exposition Fémina), l’arrivée en poste d’une directrice à sa tête devient, en soi, symbole du triomphe de la femme sur plusieurs espaces. La boucle est bouclée. Ne reste plus qu’à attendre avec hâte la seconde partie l’an prochain, assortie, cette fois, du catalogue. Très bien, mais il manque quelque chose…
Il semble que le titre idéal choisi par Esther Trépanier n’ait pas été exploité à son plein potentiel, sans doute faute de temps. Néanmoins, un ajout d’autres types d’espaces dans la structure du parcours aurait permis l’exploration en profondeur du sens à donner à cette "conquête spatiale". Nous pensons ici aux espaces visuels: picturaux et sculpturaux. Avec ces nouvelles catégories, on aurait pu parler de la simplification du dessin des Jeanne Rhéaume et Louise Gadbois, sinon du dégrossissement des volumes superflus chez Suzanne Guité ou Anne Kahanne, comme une conquête de cet espace visible où vivent les oeuvres. Cette recherche de modernité aurait mené en douceur à l’abstraction (Rita Letendre, Françoise Sullivan), où les idées et les sentiments s’incarnent à même la matière, sans sujet.
Par cela, on aurait aussi appris quels ont été les moyens plastiques employés par les femmes d’ici pour revendiquer leur unicité au sein de ces nombreux groupes. Était-ce aussi avec un choix de techniques, de compositions et de couleurs inédites pour leurs alter ego masculins ou à l’étranger? On aurait voulu lire leur originalité sauvage où création, beauté et liberté deviennent synonymes et s’accomplissent. Ainsi, en reliant leurs conquêtes des espaces de fait esthétique aux autres "espaces" conquis, on comprendra la nécessité d’une réalisation vraie dans et par l’art, qui passe par l’invention d’une identité féminine québécoise, moderne, libre.
À voir si vous aimez /
Les écrits d’Irénée Legendre, les oeuvres d’Ethel Seath
AUTRES EFFLORESCENCES
D’abord, quelque chose d’extraordinaire à La Chambre blanche: Flow de Robbin Deyo, qui commence le 8 mai. Si vous avez aimé le spirographe étant jeune, imaginez ce que pourrait être un tel mécanisme en étant inspiré à échelle humaine. Aussi, le jour précédent, le centre d’artistes du collectif Regart vous convie, dès 17h, au vernissage de l’exposition L’Art public à Lévis, organisée dans le cadre du 22e colloque annuel du réseau Les Arts et la Ville. Les deux évènements se terminent le 31 mai.