Grandeur nature : Suivre les sentiers battus
Arts visuels

Grandeur nature : Suivre les sentiers battus

Grandeur nature est l’expo d’été au MBA. Elle revient entre autres sur l’instrumentalisation de l’art à des fins nationalistes. Pays en quête d’identité.

Encore une expo sur les liens entre les arts et le paysage? L’urbain en moi et surtout le critique d’art lassé espèrent que ce sera bien la dernière pour un bon bout de temps. Dans les dernières années, au Musée des beaux-arts (MBA), nous avons eu les expos sur Emily Carr, Le paysage en Provence, Edwin Holgate qui a fait beaucoup de paysages, l’ouverture d’un espace dédié à Marc-Aurèle Fortin. Il faut ajouter à cette liste quelques expos présentées au Musée des beaux-arts du Canada (Le Groupe des Sept dans l’Ouest canadien; Tom Thomson; Cornelius Krieghoff; Les paysages de Renoir; Monet, Renoir et le paysage impressionniste), au Musée des beaux-arts de Québec (Clarence Gagnon. Rêver le paysage; encore Cornelius Krieghoff, en tournée) et sur le site du Musée virtuel du Canada (La peinture de paysage canadienne et russe entre 1860 et 1940)… Faudrait-il parfois renvoyer les commissaires d’expositions au bouleau afin qu’ils aillent bûcher un peu plus sur leurs sujets?

TERRAIN MINÉ?

Bien sûr, ce thème du paysage fut abondamment, extrêmement, infiniment traité par les artistes canadiens, états-uniens et européens. Il est donc incontournable. Et cette expo intitulée Grandeur nature: Peinture et photographie des paysages américains et canadiens de 1860 à 1918 présente des oeuvres importantes. Vous y verrez plusieurs toiles imposantes, ne tombant pas toujours dans l’académisme: magnifique est cette peinture montrant les chutes Niagara peintes par Frederic Edwin Church en 1867; prenante est cette marine (intitulée À l’approche de l’orage) de Martin Johnson Heade, à la fois proche du romantisme de Friedrich et du réalisme de Courbet. Vous y découvrirez même des artistes moins connus du public et qui méritent une reconsidération certaine, tel Winslow Homer. Mais vous y rencontrerez encore des tableaux de Krieghoff, de Carr et de Thomson sans que vous appreniez quelque chose de vraiment nouveau à leur sujet. Car côté théorique, cette expo revient sur des idées pas très nouvelles, dont celle qui tisse des liens entre le paysage et les identités nationales. Bref, elle manque d’originalité. Voici une expo très académique qui ne renouvelle pas le genre. Vous ne retrouverez pas le regard analytique qui était présent dans l’expo sur Emily Carr qui, elle, décortiquait la manière avec laquelle les historiens avaient présenté et interprété cette peintre à travers les décennies. Le spectateur se demandera aussi pourquoi le musée a choisi d’arrêter le corpus des oeuvres à 1918… Cela aurait certainement obligé le musée à sortir des sentiers battus que d’étendre la réflexion à l’art du reste du 20e siècle.

La grande nouveauté de cette expo réside dans le fait qu’elle incarne le virage vert que le musée prend et qu’elle est donc "écoresponsable" (belle expression). La scénographie, signée Atelier Big City de Montréal et Molo de Vancouver, correspond à l’idée d’écodesign. Même le catalogue est respectueux de l’environnement, les parties dédiées aux textes étant composées à 100 % "de fibres post-consommation" (pour les pages avec reproduction, ce chiffre tombe à 30 %).

À voir si vous aimez /
Krieghoff, Carr et Thomson