J.W. Waterhouse : Peinture envoûtante?
J.W. Waterhouse est à l’honneur au MBA dans une première véritable rétrospective. Après les Pays-Bas et la Grande-Bretagne, voici l’art de ce préraphaélite tardif.
Pour apprécier cette exposition du Musée des beaux-arts (MBA), il faudra passer par-dessus un début profondément ennuyeux où l’académisme de John William Waterhouse s’exhibe sans retenue. Plusieurs tableaux, comme Dans le péristyle (1874), sont d’une grande banalité d’exécution. Dans le catalogue, cette époque est classée sous la rubrique "Expériences juvéniles", et cela même si Waterhouse, né en 1849, a parfois plus de 30 ans lorsqu’il réalise ces toiles empreintes de pompiérisme.
Et puis, lentement, une originalité certaine émerge. Et on se met à réfléchir sur le fait qu’un système très contraignant et très normatif (dans ce cas-ci, l’enseignement académique du 19e siècle) peut néanmoins produire des éléments qui vont fragiliser sa propre autorité. En effet, Waterhouse a développé, à partir de la fin des années 1880, un style plus complexe, une peinture plus énigmatique, plus proche des symbolistes. Un art presque décadentiste. Son ensorcelante Circé (1892) en est un bon exemple.
Mais Waterhouse n’est pas Félicien Rops, ni Gustav Klimt, ni Fernand Khnopff, ni Odilon Redon, ni Gustave Moreau, ni même Aubrey Beardsley ou Dante Gabriel Rossetti. Il lui manque un je-ne-sais-quoi d’originalité picturale. Mais Waterhouse n’est pas non plus William Bouguereau. Son art très (trop?) raffiné a souvent su dépasser la vacuité et la redondance de l’art académique décoratif.
Voilà une expo qui risque de plaire. Au cinéma, le Moyen Âge, les récits fantastiques (Le Seigneur des anneaux) ou le magique (Harry Potter) sont en vogue et font partie de l’imaginaire collectif (en particulier celui des jeunes). Parfois, tel ce tableau montrant sainte Cécile, on se croirait plongé dans l’un de ces blockbusters. Et puis, comme le montrait le commissaire Martin Dufrasne lors du Symposium de Baie-Saint-Paul, même les artistes contemporains font dans le fantastique et le merveilleux. On ne pourra donc qu’être séduit par cette oeuvre onirique très illustrative.
Signalons que la mise en scène de l’ensemble est souvent dérangeante. Un décor noir, avec des éclairages très intenses, trouble le regard. L’idée était bonne (et il faut que le MBA continue d’explorer cette notion de mise en scène), mais on a parfois le sentiment que le résultat n’est pas tout à fait à la hauteur du projet et que la mise en scène est un peu pauvre matériellement.
À voir si vous aimez /
Les préraphaélites, Le Seigneur des Anneaux, Les pochettes de Want I et II de Rufus Wainwright