Paulette Gagnon : Un musée actuel?
En juin, Paulette Gagnon est devenue la neuvième directrice du Musée d’art contemporain. Entrevue avec celle de qui le milieu exige un dynamisme accru.
La lune de miel fut courte. Jamais un directeur de musée québécois ne s’est fait critiquer aussi vite. Dès juillet, une lettre signée par une centaine de gens du milieu a critiqué le processus de sa nomination. Depuis, le débat se poursuit… Nous nous attendions donc à voir une femme fragilisée. Pourtant, c’est une personne très décidée que nous rencontrons. A-t-elle pour autant des idées pour ce musée qui suscite tant d’attentes? C’est ce que nous lui avons demandé.
Voir: Depuis 25 ans, les musées ont changé. Cela change-t-il votre travail?
Paulette Gagnon: "Les musées se sont ouverts sur le monde. Nous pouvons l’être encore plus. Par exemple, nous avons un projet de coproduction avec le Musée de Sydney. Mais les musées sont moins riches, et diverses formes de partenariat sont une des solutions à cette situation."
Le rapport au public a-t-il changé?
"Le public est plus exigeant. Mais les musées existent pour leurs publics. Si je compare notre institution avec une galerie universitaire, ce n’est pas la même mission. C’est important qu’il y ait de la recherche universitaire dans un musée, mais il ne peut y avoir que ça. On doit être présent pour tous les publics, sinon il n’y aura plus personne dans notre institution. Il faut aller chercher différents publics: universitaire, monsieur Tout-le-monde, groupes scolaires…"
D’autres projets?
"J’ai des projets avec la Grande Bibliothèque. J’en veux aussi avec la Cinémathèque… Pour 2010, nous préparons le plus grand colloque que nous ayons eu, sur l’art et la religion. Je veux aussi de plus petits colloques. Le développement du volet éducation est une priorité. Je veux des rencontres plus conviviales avec des gens du milieu de l’art. Le 28 octobre, Louise Wilson viendra pour une rencontre. Le 2 décembre, Keith Moxey et Michael Ann Holly seront là. Ça va continuer dans cette veine: beaucoup de participations de gens de l’extérieur pour une animation culturelle accrue."
Le MAC défend-il assez les jeunes et moins jeunes artistes québécois?
"Nous avons fait des efforts, quand même! C’est moi qui ai proposé à Marc Mayer [son prédécesseur] l’idée de la Triennale d’art québécois! Elle reviendra en 2011. Elle comportera un commissaire invité qui travaillera avec nos conservateurs. Je veux des points de vue différents. Je n’avais pas besoin de la controverse pour innover. Il faut continuer de montrer plus d’artistes d’ici. Et les exporter le plus possible."
Est-ce facile de faire parler de nous à l’étranger?
"La revue Frieze a parlé de nos expos Betty Goodwin et Tacita Dean. Nous avons aussi été cités à propos de la Triennale, une des meilleures expos en art contemporain pour cette revue."
Comment réagissez-vous à la polémique autour de votre nomination?
"Il faut voir cela d’une manière constructive. Je suis très ouverte à des recommandations positives. L’aspect moins positif: ce dialogue avec moi s’est fait dans les médias… Et on revient sur 30 ans d’histoire du musée. Pourquoi n’avoir rien dit à mes prédécesseurs? Serait-ce parce que je suis une femme? Je ne le sais pas. Serait-ce que je ne leur plais pas? On ne peut plaire à tout le monde. Mais qu’on vise l’institution, ça me dérange beaucoup. Il ne faut pas se tirer dans le pied."