Mustapha Chadid : Soldat intemporel
Mustapha Chadid revient en force avec une exposition qui articule les mille et une questions se rapportant aux mystères de l’univers et du temps.
Fragments du passé ou symboles d’un futur rapproché, les oeuvres qu’expose Mustapha Chadid, à la galerie Montcalm, recèlent cette ambivalence subtile, effacée, qui s’introduit doucement dans la relation qu’elles entretiennent avec le visiteur, et qui reste dans la mémoire de celui-ci pour un certain temps. Rien de trop tape-à-l’oeil, seulement beaucoup de morceaux de métal rouillé, sans éclat, oublié, sous forme de tiges et de découpes assemblées en des structures compliquées et prodigieusement travaillées, partant du sol pour la plupart, et étalées de façon grandiose dans l’espace. Cet espace, d’ailleurs, offrant au spectateur un parcours dégagé, est ainsi divisé pour mieux régner (comme le dit si bien le dicton) sur six propositions qui, étonnamment, se rejoignent autant qu’elles diffèrent les unes des autres.
Car chacune d’entre elles (par exemple L’Onde cosmique ou Le Téléscope, sculptures cinétiques utilisant aussi la vidéo) peut se percevoir comme une variante à part entière du thème sérieux et réfléchi de la machine, et c’est ce qui pourrait surprendre les visiteurs habitués aux précédentes productions de l’artiste: ses taureaux, ses bateaux, ses autres machines à sable et à eau… Oui, on reconnaît ici son doigté et sa facture, mais on découvre également le chercheur, le scientifique dans l’âme, l’inventeur derrière ce corpus intitulé de façon majestueuse Les Soldats de l’éternité, avec un point de vue et une manière de faire un brin maladroits, presque grossiers.
À travers le parcours, l’observateur rencontre, entre autres, Le Miroir, sorte de tableau rendu vivant grâce à un mécanisme électrique faisant s’activer un modeste système de corde et poulie. Devant cet ouvrage, les questions se posent encore. S’agit-il bien d’une peinture ou d’une sculpture? Et surtout, pourquoi cette fascination lancinante pour la montée et la descente banales, imprécises, d’un simple poids au bout d’une corde, comme si cette petite fraction de métal détenait la réponse à toute interrogation?
Étrangement, c’est aussi le côté naïf et candide de ces choses, de ces appareils intemporels, qui les rend à la fois si attrayants et mystérieux.
À voir si vous aimez / Alexandre Calder, Anselm Kiefer