Milutin Gubash : Les Gubash
Arts visuels

Milutin Gubash : Les Gubash

Une comédie de situation à Sporobole? Milutin Gubash présente Born Rich, Getting Poorer, une série hallucinée sur les vicissitudes de la vie de père et d’artiste.

Le père, pour le meilleur et pour le pire, a la cote ces temps-ci au Québec. Au cinéma avec De père en flic, à la télé avec Les Parent, et maintenant en art contemporain grâce à Milutin Gubash et à sa comédie de situation Born Rich, Getting Poorer, mettant en vedette sa femme, sa mère, sa fille, sa voisine et son meilleur ami, dans leur propre rôle. Ou presque.

Bon chef de famille, Milutin sait déléguer des tâches aux autres membres du clan. Aujourd’hui, c’est sa femme qu’il envoie en émissaire. Annie Gauthier, elle aussi artiste, rétablit d’entrée de jeu la réputation de son mari. Malgré un rapport étroit entretenu avec la réalité – "Tous les moments qui sont montrés sont en lien avec la vérité, avec les choses qui nous arrivent dans la vie" -, Milutin, à la fois Mr. Bean et Larry David du 450, n’est pas dans la vraie vie cet homme angoissé, oisif et empoté. "Ce serait horrible, rigole l’épouse. La sitcom, c’est une stratégie d’approche d’un public plus large qui comporte une certaine dynamique obligée dans le récit pour faire passer le message. Lui, il est gaffeur, maladroit, c’est celui qui déçoit; moi, je suis la personne qui est constamment déçue."

SUPERCLUB SPOROBOLE

Une comédie de situation à Sporobole, que l’on visionne sur place ou que l’on emprunte sur DVD, comme dans vidéoclub, en fera sourciller d’aucuns. En bon français, ne tire-t-on pas ici fort sur l’élastique de l’art contemporain? Non, pense Annie Gauthier, puisque Gubash ne veut pas être Seinfeld à la place de Seinfeld. "D’abord, ce n’est pas vraiment une sitcom, parce qu’elle n’est pas diffusée à la télé, plaide-t-elle. Faut que la personne rentre dans le centre d’artistes. Pendant qu’elle se dit: "Pourquoi j’ai ça à regarder? Qu’est-ce que je fais de cette information-là?", elle est en train réfléchir, de faire le jeu du miroir."

La démarche s’inscrivant parmi les très actuels efforts de médiation culturelle des artistes en art contemporain ne sacrifierait donc pas à la recherche de nouveaux adeptes le propos. "Il y a l’idée de quête identitaire, d’un artiste qui essaie de trouver sa place dans un milieu et de l’autoréférence qui n’est pas présente dans une sitcom traditionnelle", juge madame.

PAPA MAMAN COOL

Émigré de la Serbie au Canada enfant, Milutin Gubash élabore une oeuvre où ses parents – pas artistes pour deux sous -, tiennent un rôle primordial. L’artiste avait par exemple rejoué avec eux des faits divers tirés du Calgary Herald pour une série de photos en 2003. Un autre faire-part envoyé aux habituels exclus du party de l’art contemporain. "Tout à coup, ils ont une clé pour comprendre de quoi il s’agit, ça devient accessible", résume Gauthier.

Décédé mais toujours bien présent, le père, spectral, taraude le Milutin de la série alors qu’il cherche à lui rendre un dernier hommage (en urinant sur le terrain des voisins!!!). "Ça a toujours été pour lui une façon d’entrer en contact avec ses parents et de faire quelque chose de significatif. Ça permet d’avoir des discussions plus élevées que de demander: "Qu’est-ce que t’as fait aujourd’hui? T’as mal où?""

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