Aristide Gagnon : À la croisée des sphères
Arts visuels

Aristide Gagnon : À la croisée des sphères

Le Centre culturel Yvonne L. Bombardier présente Fusion, une généreuse incursion dans l’univers parallèle et sphérique d’Aristide Gagnon.

Du haut de ses 79 ans, Aristide Gagnon a beau avoir connu plusieurs printemps, sa création récente témoigne d’une fougue artistique digne d’un jeune premier aux visées contemporaines. L’exposition Fusion permet de fureter dans le passé de l’artiste et de saisir les fondements de son langage.

Le parcours débute par quelques natures mortes et portraits conçus entre 1960 et 1980. Le trait est volontairement peu nuancé, permettant aux visages de se dégager des couleurs tels de saints suaires dissimulant de jolies filles portées disparues. La plupart des oeuvres sont gorgées de blanc. C’est vaporeux comme un souvenir qui s’échappe. D’autres portraits en noir et blanc, des monotypes sur papier faits en 80, sous-tendent que le figuratif de Gagnon ne peut qu’être onirique.

Ses peintures plus récentes sont davantage des oeuvres spontanées, abstraites. Elles font penser aux grandes fresques de Riopelle, mais le style de Gagnon est moins dense et impose un regard différent sur les nuées de couleurs (majoritairement très voyantes) qui se dégagent des traces de coups de spatule. Certaines formes géométriques se mêlent à la masse: cercles parfaits, angles droits… Parfois, la peinture se retrouve dans un cadre peint sur lequel les couleurs débordent. On aime à penser qu’il s’agit là d’une frontière que le chaos ne peut dépasser.

LA RONDEUR DE L’ATELIER

Fusion met l’accent sur le travail de sculpteur d’Aristide Gagnon. Le bronze est son matériau de prédilection, mais on trouve quelques sculptures en aluminium. Certaines sont abstraites et rappellent le travail de recherche sur la matière d’un Armand Vaillancourt, mais c’est le raffinement des sphères de l’artiste qui demeure le plus fascinant. Elles sont toutes éblouissantes, mais aucune ne se ressemble. Elles sont couvertes de ce qui pourrait être des symboles inconnus, des profils, des feuilles, des hiéroglyphes ou des fossiles. Parfois, on pense au globe d’une planète fictive composée d’étranges continents. Il s’en dégage d’étonnantes couleurs et reflets. Du bronze, l’artiste obtient du turquoise, du bleu vif, du doré. Sur certaines oeuvres, des trous permettent de voir l’intérieur des structures, comme s’il y avait un microcosme, un espace secret.

D’ailleurs, Aristide Gagnon ouvre les portes de son atelier; celui-ci est recréé dans une des salles grâce à d’immenses photos. Une vidéo qui joue en boucle permet de le voir travailler. L’éclairage rouge donne une perspective nouvelle aux sphères contenues dans la pièce et transforme celle-ci en un lieu de recueillement. Il est noble et solennel, le travail d’Aristide Gagnon.

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Riopelle, les sculptures en bronze, les portraits