Bruno Bouchard : Foule sentimentale
L’Homme-foule, c’est une condition que nous vivons tous et que Bruno Bouchard a décidé d’illustrer en utilisant toutes les disciplines artistiques possibles. Un chaos projeté dans un cadre plurisensoriel.
Le Théâtre Rude Ingénierie, en collaboration avec les productions Recto-Verso et Premier Acte, nous présente une oeuvre au caractère multidisciplinaire qui s’intitule L’Homme-foule. Déjà actif au sein du collectif musico-théâtral L’Orchestre d’hommes-orchestres, Bruno Bouchard a réuni autour de lui des artistes issus de différents domaines d’expression artistique afin d’illustrer un propos bien défini: l’individu en relation avec son environnement. Du moins, c’est en résumé l’une des prémisses de cette création. "C’est un spectacle qui décompose l’univers d’une personne en six performances distinctes et qui décompose 12 secondes en une heure. Une forme de représentation de l’univers intérieur d’une personne alors qu’elle est confrontée à son environnement", nous explique-t-il.
En compagnie des performeurs Philippe Lessard-Drolet, Simon Elmaleh, Nicolas Gagnon, Jasmin Cloutier et Yana Ouellet, il a conçu une trame narrative instinctive où chacune des disciplines artistiques (le théâtre, la sculpture, la vidéo, la musique, l’électro-acoustique et le bruitage) se retrouve en contact avec les autres pour donner une représentation plastique du quotidien urbain. "C’est la rencontre avec l’autre, l’inconnu, expose-t-il. Cette pièce, c’est un travail formel, mais c’est quand même fait dans un cadre théâtral. Il y a un protagoniste, un personnage masqué, totalement anonyme. Il est devenu l’homme-foule; c’est comme ça qu’on l’a nommé au fur et à mesure des répétitions. Son visage est recouvert d’un porte-voix en carton qu’il porte à l’envers. C’est comme un long nez pointu et c’est assez expressionniste. Les conditions qui sont relatées, elles, sont très réalistes. C’est une espèce de sculpture vivante en mouvement qui s’exprime parfois dans un contexte surréaliste."
C’est en s’inspirant du quartier où il vit, Saint-Roch, que l’initiateur du projet a élaboré cette idée de performance au pluriel. Sensible au caractère qui distingue la ville de Québec des autres, l’artiste nous révèle, avec cette production, un questionnement bien personnel. "Pourquoi on s’ennuie? Quels sont les outils qu’on peut utiliser pour ne pas s’ennuyer? Qu’est-ce que l’individu s’approprie comme rôle dans un tel contexte? Ce sont des thèmes qui me touchent depuis longtemps. C’est en relation avec notre quotidien et c’est inspiré de la vie que je mène dans mon quartier. Je pensais même situer encore plus l’univers de cette pièce dans Saint-Roch, en faisant des samplings de gens dans la rue, par exemple. Je constate qu’il y a un certain ton gris dans cette ville. On sent que les gens sont motivés à ce qu’il se passe quelque chose! Ce n’est pas identifié clairement dans ce spectacle, c’est en toile de fond, mais pourquoi avons-nous un taux de suicide aussi élevé dans une ville aussi paisible ? Comment une communauté pourrait contrer l’ennui? Ce sont des questions qui sont soulevées dans cette pièce. Nous avons un devoir individuel dans une foule."