Nicolas Baier : Clarifier l’obscurité
Nicolas Baier, au Musée canadien de la photographie contemporaine, propose un corpus qui fait réfléchir aux principes conditionnant notre perception.
À travers l’exposition Nicolas Baier. Paréidolies, le spectateur est invité à repenser et à réinterpréter des photographies d’objets dont l’identité et la provenance ne sont pas, au premier coup d’oeil, implicitement révélées. En fait, toute la recherche du créateur est basée sur le phénomène de la paréidolie qui, selon le communiqué, constitue une manifestation psychologique par laquelle le cerveau de l’homme identifie des entités familières dans des formes abstraites, par exemple des figures animales dans les nuages.
Ici, à une présentation qui enrichit l’éminence du propos (nombre d’oeuvres pertinent, disposition aérée et divisée en deux thèmes intimement liés), se raccorde une démarche élaborée. Étonnamment, les idées qui en ressortent et le processus d’exécution se complètent vivement.
Dans la première salle, les épreuves qui dépeignent, de façon abstraite, des surfaces agrandies d’éléments numérisés poussent d’instinct l’observateur à définir formellement ce qu’il voit. Avec des titres suggestifs (par exemple, La Transformation des nuages), Nicolas Baier précise la lecture qu’il fait lui-même des oeuvres. Pour lui, comme pour la majorité des gens, le paysage est ce qui est déchiffré la plupart du temps. Ce jeu de devinettes de l’esprit, aussi dirigé qu’il soit, s’avère assez intéressant car, au bout du compte, les interprétations qui en découlent, liées à l’expérience du témoin, le retournent immédiatement à sa propre existence, un peu comme le ferait un miroir.
Et c’est cet instrument qui est surtout étudié dans la seconde salle, où deux ouvrages monumentaux se répondent astucieusement de manière opposée. La pièce Vanités, composée d’une quarantaine d’images de miroirs numérisés (renvoyant donc leur propre et vacant reflet), fait face à Noirs, une série photographique de type traditionnel que l’artiste a tenté de dépouiller de son contenu. Chercher en vain ce que comprend le vide, et tenter de désemplir une charge de ce qu’elle contient, voilà une piste de réflexion sur laquelle quiconque peut méditer longuement.
Dans cette exposition à ne pas manquer, le visiteur découvre avec éblouissement chaque oeuvre ainsi que les mécanismes qui ont mené à bien sa création.
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