La Fin : Crise existentielle
Le plus récent spectacle du NTE, La Fin, se penche sur l’éternelle obsession de l’homme: sa propre disparition. Une exploration malheureusement peu convaincante.
La fin, pour Alexis Martin et Daniel Brière, c’est la perte des repères identitaires traditionnels, la mort et le commerce qui règne autour, une expérience scientifique qui tourne mal, la disparition de certaines cultures, un couple qui se désagrège, la destruction de la nature au profit de constructions humaines, la primauté de la nouvelle catastrophiste sur l’information, etc.
Toutes ces pistes sont explorées dans une succession de courtes scènes entre lesquelles un lien artificiel est créé par la récurrence de certains personnages. Malheureusement, la minceur de la trame dramatique ne parvient pas à donner une impression d’unité et le propos manque de consistance. Résultat: un spectacle hétérogène et creux dans lequel les comédiens – Marie Brassard, Daniel Brière, Michel Charette, Sharon Ibgui, Alexis Martin – portent plusieurs casquettes sans qu’aucune se démarque particulièrement.
Le concept de matière comme essence de l’existence revient plusieurs fois, en écho à la fameuse maxime de Lavoisier (empruntée à Anaxagore de Clazomènes): "Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme." Cette matière a inspiré la scénographie, avec une sorte de pâte liquide (la "schnoute", dont la recette est donnée dans le programme) qui dégouline du plafond et dans laquelle les comédiens se vautrent, et une autre, plus compacte, qu’ils pétrissent pour lui donner diverses formes. Cet aspect est le plus intéressant du spectacle, et on y retrouve l’inventivité qui fait habituellement notre joie dans les créations du NTE. Les grandes coulées de pâte sur d’immenses panneaux de plastique offrent de belles images et les modelages apportent quelques touches d’humour.
Pour le reste, le spectacle est extrêmement verbeux. Entre une leçon de philosophie inspirée du Grec Empédocle d’Agrigente et une leçon de physique quantique tirée d’une expérience d’Erwin Schrödinger, les personnages nous font part de considérations plutôt faciles sur l’existence… ou sa fin. Ici ou là, on perçoit une critique des "intellectuels" qui discourent comme s’ils étaient les heureux bénéficiaires d’une inspiration divine permanente, mais l’instant d’après, le texte verse lui-même dans un lyrisme empesé, si bien que l’on ne sait plus trop où est la satire.