Isabelle Gauvin : Simplicité volontaire
Avec Mode d’emploi pour sortie de secours, Isabelle Gauvin a redécouvert le plaisir simple de peindre.
Isabelle Gauvin a l’habitude des projets artistiques d’envergure. L’Échiquier des sourds, une collaboration avec des personnes malentendantes, a d’ailleurs remporté le Prix des arts visuels Stelio-Sole l’an dernier aux Grands Prix culturels de Trois-Rivières. Mais après avoir connu la folie des grandeurs, la peintre trifluvienne a ressenti le besoin d’un retour aux sources, d’où Mode d’emploi pour sortie de secours.
"Après m’être vidée dans le projet de L’Échiquier des sourds, qui était un gros projet relationnel, j’ai eu envie de peindre pour moi, explique-t-elle, quelques heures avant son vernissage. J’étais reconnue pour mes manoeuvres, pour mes projets interrelationnels. Je faisais des oeuvres – un peu de la performance – qui impliquaient la participation des gens: La Petite Fabrique du bonheur, L’Échiquier des sourds ou Le Guichet à coeur ouvert. Et là, tout d’un coup, parce que ça demande beaucoup d’énergie de faire ça, j’ai eu envie d’y aller pas trop dans les grandeurs et d’être avec moi-même. "
SANS BALISES
"La chose la plus facile pour moi, c’est peindre, poursuit-elle. Je peux faire ça n’importe quand, n’importe où. Ce n’est pas comme monter un gros projet où il y a plein, plein de balises et de choses dont il faut tenir compte – L’Échiquier des sourds avait reçu une bourse du CALQ (Conseil des arts et des lettres du Québec), ce qui imposait un encadrement… Tandis que là, mon plaisir, c’était d’être dans mon atelier, de peindre, de créer et de n’avoir aucune contrainte, à part celle du temps." Le temps de tout terminer avant l’exposition. Un objectif qui lui semblait difficile à atteindre puisqu’elle vendait ses nouvelles toiles au fur et à mesure qu’elle les finissait.
Ainsi, Mode d’emploi pour sortie de secours se veut hétéroclite. Des oeuvres plus anciennes, dont des dessins présentés lors de l’événement Rose miel à la Maison de la culture de Trois-Rivières, côtoient sa production récente. Ses nouvelles toiles, bien qu’elles conservent un éternel caractère grinçant, sont souvent ludiques. Et la démarche derrière l’est tout autant. Par exemple, le point de départ de certaines oeuvres a été une paire de lunettes recyclées. Isabelle Gauvin, qui récupère depuis un certain temps les vieilles montures et leurs verres, invitait parfois ses amis à en essayer une le temps d’une photo. Puis elle créait spontanément à partir du cliché et des commentaires émis par "l’essayeur".
Au cours de l’entretien, la peintre signale qu’à son grand bonheur, elle se fait de plus en plus inviter à collaborer à d’autres projets artistiques. Une conséquence directe de son Prix des arts visuels Stelio-Sole? "Il y a eu un changement dans la reconnaissance. Dans le fond, ça m’a apporté une grande visibilité. À partir de maintenant, je n’ai plus à faire mes preuves", dit-elle en toute humilité.