Josée Wingen : Prendre le pouvoir
Arts visuels

Josée Wingen : Prendre le pouvoir

Dans Les Coulisses du pouvoir, Winji, alias Josée Wingen, interroge nos fondements en tant que société.

Jusqu’à la fin du mois de mai, il sera impossible de circuler comme à l’accoutumée au premier étage de la Galerie d’art du Parc. En effet, pour y présenter Les Coulisses du pouvoir, Josée Wingen a complètement réaménagé l’espace. Il faut désormais emprunter un étroit couloir dans lequel de petites ouvertures offrent une vue restreinte sur différentes installations, des créations tantôt étranges, tantôt rigolotes qui explorent nos valeurs en tant que société québécoise.

Bien que son titre rappelle celui d’une certaine émission à Radio-Canada, l’exposition ratisse beaucoup plus large que la seule politique. "En fait, c’est politique, mais à tous les niveaux, explique l’artiste de Bécancour. Ce sont tous les pouvoirs qu’on a: social, politique, interpersonnel… Moi, je travaille toujours un thème et, après, je le décortique, je m’amuse à travers ça." La famille reconstituée, la prorogation du Parlement, le simple regard de l’autre sont autant de sujets qu’elle aborde. "Il y a quelque chose dans notre société qui a changé, je trouve, dans les fondements. Il y a une espèce de paranoïa qui s’est installée. On ne sait pas c’est dû à quoi, mais on s’en doute… Par exemple, quand on était petits, on ne barrait jamais les portes ni des autos ni des maisons. Aujourd’hui, tu pars juste te promener, tu verrouilles ta portière d’auto. Il y a un instinct primaire qui est ressorti. C’est un peu dommage, parce que c’était un acquis: une société qui est assez à l’aise pour vivre de cette façon-là. Je trouve que c’est un recul d’être rendus là. Et on a perdu cette sécurité en l’espace de 40 ans."

"C’est étonnant comme on a perdu toutes racines et idéologies, poursuit-elle, en montrant du doigt son oeuvre Code d’éthique ou le cynisme de madame Bérubé. On était basés sur la religion. Là, on a tout fait éclater. Les gens ne croient plus, c’est correct. Mais on a perdu tout un côté civique à travers ça, une idéologie sociale."

Parlant de société, Josée Wingen ne se gêne pas pour émettre son opinion sur les accommodements raisonnables. Sa pièce préférée traite par ailleurs du sujet: un pont suspendu en babiche. "Je ne suis pas contre l’immigration, sauf qu’il y a quelque chose qu’on n’a pas réglé en tant que société. À propos de nos fondements, on a jeté le bébé avec l’eau du bain On a été déstabilisés. Pourtant, c’est important d’être stable en tant que peuple, d’avoir nos règles, nos bases, notre idéologie. C’est de servir l’immigration que de mettre des balises claires", souligne-t-elle.

Une oeuvre de Wingen attire particulièrement l’attention. Devant une fenêtre, une lentille modifie le paysage extérieur. À travers celle-ci, tout est inversé: les arbres pointent le sol, le ciel semble une large étendue d’eau. "Je l’ai appelée Le Pouvoir de l’artiste. Pour moi, cet espace [la Galerie d’art du Parc] n’a pas la même connotation, parce que je travaille aussi dans les lieux. J’ai remarqué que chaque fois que quelqu’un passe devant cette fenêtre, il regarde dehors, le fleuve. C’est le pouvoir de l’artiste de pouvoir mettre ça à l’envers, de déconcerter un peu. C’est tout simple, mais c’est un petit clin d’oeil à mon pouvoir à moi."

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