François Mathieu : Jeux d’enfants
Dans Ces grandes choses dans les petites choses, François Mathieu a créé d’incroyables machines… inutiles.
Un imper pour empêcher les nuages de pleuvoir, une rampe de lancement pour une machine à voler, des échasses aux pieds cassés… Les oeuvres que François Mathieu a rassemblées pour Ces grandes choses dans les petites choses ont pour point commun d’être des inventions poétiques qui ne fonctionnent pas. Pourtant, au premier coup d’oeil, elles semblent toutes avoir une vocation bien précise.
"Aujourd’hui encore, on se questionne à savoir si l’art est utile, explique l’artiste du comté de Lotbinière. Je pose donc la question à travers des objets qui ont justement l’air utiles. Quand on les regarde, on a non seulement l’impression qu’ils sont utiles, mais que j’ai déployé beaucoup d’énergie pour les faire. Et je trouve que c’est ça qui donne encore plus de valeur au paradoxe. Quand on déploie des semaines, voire des mois de travail pour faire un objet inutile, on affirme encore plus l’importance de faire les choses généreusement sans rien attendre en retour."
Mais quelle réflexion se dissimule derrière Ces grandes choses…? "L’idée de départ, c’est que derrière chaque chose que l’on regarde, il y en a une plus grande que l’on ne voit pas, qui est cachée par la petite. On pourrait le dire d’une autre façon: il y a un dieu derrière la machine. Bref, il y a toujours quelque chose qui sous-tend les réalités que l’on voit. Moi, j’aime observer les choses et me demander quelle mécanique est derrière ça. Qu’est-ce qui fait que les choses tiennent ensemble?"
L’ENFANT DERRIERE L’OEUVRE
Un plaisir évident transpire du travail de Mathieu. L’enfant autant que l’adulte peut d’ailleurs se sentir interpellé par celui-ci. "Il y a effectivement un certain ludisme dans mes oeuvres. Ce sont des jeux d’enfants, mais joués par un adulte. Les enfants – moi, j’en ai un – passent beaucoup de temps à bricoler. Ils vont jouer avec une boîte de carton, des fois avec un élastique. Sauf que lorsque c’est un adulte qui le fait, qui dépense, qui va dans les quincailleries, qui s’achète du matériel, et qui persiste à faire des choses inutiles, là, il y a comme une part de jeu plus affirmée", estime-t-il.
François Mathieu a un dossier universitaire bien rempli. Il a terminé un baccalauréat en arts plastiques à l’Université Laval et une maîtrise en études québécoises à l’Université du Québec à Trois-Rivières, mais il a aussi obtenu un baccalauréat en philosophie à l’Université Laval. Cette dernière spécialisation influence-t-elle son travail actuel? "Ça fait très longtemps que j’ai fait ça. C’est dans les années 80 que j’ai étudié en philosophie. Je te dirais que ce qui reste de cette période-là, c’est que les objets, et peut-être plus les précédents, que je créais étaient inutiles, mais en fonction d’une fin qui était complètement inaccessible. Si on prend les objets que j’ai dans la salle, il y a une section qui parle de ce qui se passe quand on décolle. À quoi on s’arrache quand on ne porte plus par terre? À quel prix on se détache du sol? La philo est restée un petit peu. Mais tranquillement, je commence à oublier", rit-il.
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