Maurizio Cattelan : C’est du sérieux
L’oeuvre de Maurizio Cattelan est paradoxale, provocatrice, séduisante. Bref entretien avec l’un des artistes les mieux cotés du milieu de l’art contemporain.
Dans La vie en Pop. L’art dans un monde matérialiste, à l’affiche au MBAC tout l’été, Untitled, de Maurizio Cattelan, se détache carrément du lot. Un cheval empaillé, étendu sur le sol et surplombé d’un écriteau sur lequel est inscrit INRI en lettres noires, propose une lecture à multiples facettes, dépendante du regard exclusif de celui qui s’y arrête.
La réceptivité du spectateur est ce qui semble motiver Cattelan lorsqu’il conçoit ses créations "Une oeuvre d’art est incomplète sans les commentaires, les mots et les idées de celui qui l’observe", nous écrit l’Italien d’origine, reprenant son souffle après le déroulement du festival new-yorkais No Soul for Sale, dont il est commissaire. "Celui qui produit l’oeuvre, c’est le témoin. Moi, je ne fais rien!"
Ses pièces les plus connues ont d’ailleurs presque toujours heurté de plein fouet la conscience des gens. Pensons à La Nona Ora, une sculpture grandeur nature du pape Jean-Paul II écrasé par un météorite, ou à cet épisode où il avait accroché, avec du ruban adhésif, son galeriste sur les murs du lieu de diffusion.
Quand on demande à l’autodidacte pourquoi il a décidé de suivre la voie de Picasso et de Warhol, ses maîtres penseurs, il répond: "J’ai fait plusieurs choses avant de devenir artiste. Je cherchais un moyen d’acquérir plus de liberté, d’échapper aux autorités en place. Mais je ne crois pas avoir réussi à faire les choses différemment des autres. J’ai simplement inventé un système qui me donne la liberté d’exprimer ma pensée, ou plutôt, d’exprimer la pensée des autres. Ce qui m’intéresse avant tout, c’est la possibilité de produire des images qui provoquent des réactions, et qui deviennent les miroirs de notre temps."
Subséquemment, celui qui prépare sa première rétrospective au Guggenheim de New York pour l’automne 2011 reste discret sur ses intentions derrière la création d’Untitled. "Ce n’est pas tant la concrétisation des intentions qui importe, mais bien le fait qu’il s’agit d’une image, précise-t-il. Les images ont le pouvoir de résumer le présent et peut-être de le transformer en une anticipation du futur. Je ne suis pas vraiment intéressé par la provocation. L’art n’existe pas sans la diversité des points de vue et les interprétations des observateurs… Peut-être même que vous et moi n’existons pas!"
Dernière remarque tout à fait honorable, mais qui porte tout de même à réflexion, surtout lorsque l’on sait qu’en guise de fantaisie, Cattelan délègue parfois son assistant Massimiliano Gioni pour accorder des entrevues, et que les journalistes se laissent toujours prendre au piège…
Merci à Héloïse et Nathalie, de la Galerie Emmanuel Perrotin, pour leur aimable collaboration.
À voir si vous aimez /
Marcel Duchamp, BGL
La semaine prochaine, lisez la troisième et dernière partie de la série d’articles consacrés à La Vie en Pop du Musée des beaux-arts du Canada.