Ken Russell : Qui a peur de Ken Russell?
Arts visuels

Ken Russell : Qui a peur de Ken Russell?

Jusqu’au 25 juillet, le cinéaste Ken Russell, de passage à Fantasia où il présentait The Devils et recevait un prix honorifique pour l’ensemble de sa carrière, fait l’objet d’une rétrospective à la Cinémathèque québécoise.

Subversif, outrancier, flamboyant, kitsch, extravagant, baroque. Nombreuses sont les étiquettes qu’on a collées, tantôt avec admiration, tantôt avec dédain, au fil du temps au cinéaste britannique Ken Russell, 83 ans, qui connut son heure de gloire durant les années 1960 et 1970.

Qu’on se rappelle son adaptation exaltée de Women in Love (25 juillet), d’après D.H. Lawrence, avec ses acteurs fétiches Oliver Reed et Glenda Jackson, sa furieuse illustration des abus de l’Église qu’est The Devils (en reprise à Fantasia le 27 juillet), avec Reed et Vanessa Redgrave, son vibrant opéra rock Tommy, avec Roger Daltrey et Ann-Margret, qui ne sera hélas pas présenté lors de la rétrospective.

"Pourquoi donc? C’est un bon film pourtant! La scène de Pinball Wizard n’est-elle pas mémorable? J’adore aussi la scène où Ann-Margret est bombardée de toutes sortes de choses par la télé", lance Russell. Alors qu’on lui énumère les 10 films choisis, il réagit à Valentino pour lequel il a refusé de tourner The Rose, la plus grande erreur de sa vie, selon lui.

"Ce n’est pas un mauvais film, affirme-t-il avec son regard bleu perçant, mais ce n’est pas un bon film non plus. En fait, Rudolf Nureyev s’est révélé un moins bon acteur que je ne l’aurais cru."

Au début de sa carrière, on surnommait Ken Russell le Orson Welles anglais et le Fellini du Nord: "Cela me flattait qu’on me compare à Fellini, avec qui je me suis très bien entendu et que j’ai même surnommé le Ken Russell de l’Italie. Nos films ne se ressemblent pas, mais je crois que nous partagions beaucoup de points en commun."

Si on l’a comparé à Fellini, bon nombre de critiques n’ont pas été tendres à son égard. On n’a qu’à penser à Pauline Kael du New Yorker, qui a déjà affirmé que la réputation de Russell tenait à une profusion de mauvaises idées. "Celle-là, elle me détestait! se souvient, non sans sourire, le cinéaste qui esquive les questions sur ses possibles dauphins et la contemporanéité de son oeuvre. Il y avait aussi Alexander Walker du London Evening Standard que j’avais frappé avec sa critique parce qu’il y disait des faussetés sur moi. J’ai quitté le plateau de télé et il est demeuré bouche bée. Je préfère oublier ce genre d’histoires. De toute façon, j’ai survécu à tous les critiques: ils sont morts, et moi, toujours vivant…"

Et toujours amoureux du cinéma, même si celui-ci ne l’impressionne pas comme avant: "J’ai vu un film de science-fiction avec des bonshommes bleus, c’était plutôt bien. Pour moi, le plus grand film de tous les temps demeure Metropolis de Fritz Lang", affirme celui qui compte Romy and Michele’s High School Reunion dans son top 10.

Et le meilleur film de Ken Russell? "Mon court métrage de Noël A Kitten for Hitler!" lance spontanément le réalisateur. Et le prochain? "Moll Flanders est tombé à l’eau puisque le producteur est décédé…" conclut le réalisateur, l’air de dire que sa carrière est sans doute derrière lui.

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L’exposition Ken Russell, photographe se poursuit jusqu’au 27 août au Foyer Luce-Guilbeault.

The Devils passera en reprise à Fantasia le 27 juillet.