Louis Helbig : Splendeur pétrolière
L’exposition de Louis Helbig, à la Galerie d’art de l’hôtel de ville d’Ottawa, est étrange. À l’entrée, la photographie intitulée Highway 63 Bitman Slick montre, au dire du panneau explicatif placé quelques mètres plus loin, un voile de bitume résiduel s’élevant au-dessus d’un autobus. L’épreuve surprend d’abord par l’actualité de sa thématique, soit les sables bitumineux, mais aussi par sa perspective presque surréelle, et qui place le témoin devant des détails qui lui sont étrangers.
L’autre épreuve qui l’accueille: Alluvial Fan, une grosse masse dorée, brillante, texturée à souhait, et qu’il jurerait pouvoir toucher. Aussi attirante que de l’or.
Le parcours se poursuit. Residual Bitume laisse perplexe (le goudron arbore-t-il vraiment cette franche couleur bleue?), tandis que des prises de vue aériennes de paysages industriels font voir l’immensité prodigieuse de l’entreprise pétrolière albertaine. Le tout reste à la surface du sujet, la photographie jouant le rôle d’un écran protecteur qui, tout en documentant, épargne de la réalité tangible de ces lieux: l’odeur âpre du goudron, la pesanteur de l’air, les nuages de poussière…
La pièce la plus saisissante, au détour d’un mur: Tonka Trucks, dont l’éclairage matinal révèle cinq camions à benne affairés au prélèvement du bitume minier. Vus de loin, minuscules comme des babioles d’enfants, c’est à travers eux que le spectateur comprend, thématique et titre de l’exposition en tête (Beauté et destruction), que le jeu est certainement dangereux.
L’artiste étant pilote d’avion professionnel, il propose au visiteur des points de vue privilégiés, et introduit un sujet dont personne, malheureusement, n’a encore fini d’entendre parler.
À voir si vous aimez / Guy Lavigueur, Bertrand Carrière