Chantal Brulotte : En apesanteur
Arts visuels

Chantal Brulotte : En apesanteur

Après avoir taillé la pierre, Chantal Brulotte explore les possibilités du papier dans L’air est immense.

Le dernier souvenir qu’on a de Chantal Brulotte, c’est son travail avec la pierre. À cette époque, en 2003, l’artiste avait taillé un calcaire de quatre tonnes. Ce qu’elle présente en ce moment au Centre d’exposition Raymond-Lasnier n’a cependant rien à voir avec cette oeuvre. Même que ça va dans la direction opposée; son installation L’air est immense, faite à partir de papiers-calques, se distingue par sa légèreté.

"Je pense qu’il n’y a plus grand-chose de lourd dans mon travail. C’est de plus en plus léger. Même que ce n’est pas loin de la disparition. [Rires.] C’est spirituel, presque. Mais ce n’est pas religieux. C’est sûr qu’il y a des questions techniques derrière ce changement. La pierre, ça prend du temps et ça demande des installations spéciales. Et depuis que j’ai commencé à enseigner, le temps est devenu une denrée rare", explique celle qui a récemment déménagé à Québec pour le boulot.

LE POIDS DES MOTS

Dans L’air est immense, Chantal Brulotte a intégré l’écriture à sa démarche artistique. Les mots de Jean-Guy Lachance, poète de Victoriaville, font partie intégrante de son oeuvre. "Je l’avais invité à venir voir mon travail et à écrire quelque chose. Ça a pris un certain temps et, un jour, il m’a rédigé un long poème. J’ai décidé de mettre ça en espace. C’est comme de la poésie, mais matérialisée. Ce n’est pas de la figuration de poésie ni de l’illustration. Ce sont des mots dans l’espace." Ces derniers, à la fois solides et fragiles, flottent dans les airs, attachés au plafond par des fils, ou se retrouvent sur de fines banderoles de papier. Et ils parlent de voyages… "Il y a une suite logique dans le poème, mais il n’est pas monté de cette manière; les mots sont déplacés. Ici [l’expo, créée en 2008, a été présentée dans trois ou quatre autres villes auparavant], il y a des parties que j’ai enlevées, d’autres que j’ai condensées au milieu de la salle. Ce que je trouve intéressant dans le fait de morceler le poème, c’est que les gens ramènent les petits bouts qu’ils veulent. Et ce poème, je trouve qu’il évoque beaucoup de lieux. Moi, je vois toujours des images quand je le lis, des images parfois étranges. Et quand on le lit vraiment au complet – je vais quand même l’afficher -, on suit une espèce de voyage, dans lequel on sent une fatigue, un questionnement."

Un voyage qu’on effectue dans un lieu sans âge puisque tout est blanc. "La couleur, pour moi, c’est un monde en soi. Et mettre de la couleur, c’est faire intervenir autre chose. Alors que dans le blanc, il y a comme une pureté, pas sur le plan symbolique, mais dans le sens qu’il n’y a rien et qu’on ne peut pas être distrait", conclut Brulotte.

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Le blanc, la poésie, la légèreté