William Brymner : Regarder hier, aujourd’hui
En ce moment au Musée national des beaux-arts du Québec est montrée William Brymner: peintre, professeur et confrère, exposition organisée par le Agnes Etherington Art Centre de Kingston, Ontario.
Dans un article critique sur cette exposition, une de mes collègues osait ces mots: "L’exercice confirme […] la mission d’archives que s’est donnée le MNBAQ. Vous l’aurez compris, l’intérêt de cette sélection d’art canadien est technique et historique, l’émoi qu’elle suscite est plutôt minimal." Commentaire assassin? Peut-être, mais si criant de vérité: cette jeune femme confirmait l’effet donné par la façon actuelle des institutions de traiter l’art ancien, ici et ailleurs. Soit le plus parfait exemple de ce que l’art dilué par un propos sociohistorique et des thématiques fourre-tout peut devenir morne et monotone.
Ce ne sont pourtant pas ces oeuvres qui font défaut, car prises isolément, la plupart sont des joyaux. Ni même le magnifique catalogue illustré qui nous permet de mieux saisir le propos. Non, clairement et une fois encore, c’est la façon machinale de les exhiber sous les titres les plus vagues qui a raison de notre engouement: Vues de l’étranger, Vues d’ici: la ville / la campagne, Au-delà de la figure académique, La figure humaine et le style moderne. Bon sang, quel ennui! Qu’est-ce que ces catégories nous apprennent? Peu de chose, sinon que n’importe qui est à même de constater le sujet d’un tableau. Pourquoi ne peut-on pas éclairer cet art avec des yeux neufs comme on le fait si bien pour les expositions d’art contemporain? Voyez en parallèle Chimères/Shimmer pour vous en convaincre…
Enfin, sous prétexte de montrer l’influence de Brymner, on assiste à un éclectisme esthétique douloureux. Une émulation vraiment confuse – puisque, semble-t-il, la principale qualité pédagogique du maître était "de ne jamais imposer sa manière aux étudiants" (Anne Savage). Puis ces satanés murs jaunes avec leur effet catastrophique habituel: faire ressortir des contrastes criards d’oeuvres qui avaient pourtant été si habilement équilibrées dans leurs tons.
Aussi, détrompez-vous, j’estime l’art ancien tout autant (et parfois plus) que l’art actuel; seulement, quand on le traite de cette manière, c’est cet amour inconditionnel qui est blessé.
À voir si vous aimez /
La photographie d’Alexander Henderson, la lumière de Clarence Gagnon, les feuillages de Corot