Espace Virtuel : L’espace d’un instant
À Espace Virtuel présentement, l’esthétique des matériaux de deux propositions nous propulse au-delà du toucher, de la vue, de l’ouïe, à travers une émotion du monde flottant à la surface du temps et de l’espace.
L’ambiance est calme, la lumière faible et berçante, comme dans un planétarium. Attendre le spectacle de l’univers, pour voyager immobile au son de sa propre respiration. L’esthétique de présentation épurée des oeuvres de David Spriggs donne l’illusion d’un aquarium contenant une galaxie, une tornade, une explosion figée. D’un phénomène naturel puissant que nous avons la chance d’observer sans danger. Même en arrêt, la forme conserve la tension et le mystère d’une force organique en mouvement. Vision, la pièce présentée à Espace Virtuel, habite la salle de sa solitude sereine. Solitude d’étoile.
L’artiste au parcours international se demandait comment représenter la peinture en trois dimensions. Il a ainsi élaboré sa façon de faire, qui consiste à peindre à l’aérographe sur de larges feuilles de plastique transparent qu’il superpose. Le spectre d’images plates disposées en strates crée la perspective, plutôt que le traditionnel point de fuite. La personne devient donc le point le plus important dans l’expérience spatiale et picturale offerte par Spriggs. La relation du corps par rapport à l’impression de mouvement est apaisante; on a la sensation d’être en apesanteur. Faisant une rotation complète autour de l’installation, on apprécie les différents effets de perspective se révélant, la façon dont la réflexion de la lumière dévoile la forme sphérique, l’efficacité de la matière à provoquer un mirage d’énergie mouvante.
Dans la seconde salle du centre d’artistes prend place une installation sculpturale qui, à première vue, n’a pas de lien avec celle de Spriggs. Il s’agit d’une oeuvre de Jonathan Villeneuve intitulée Faire la vague. Un dispositif mécanique inflige une légère poussée à une rangée de poutres de bois, entraînant un mouvement qui évoque une vague. Un bruit lent provient du frottement du bois contre le bois, réconfortant et inquiétant à la fois. Bateaux amarrés, vieilles maisons et touches de piano surgissent à l’esprit. Narrations éveillées par des matériaux faisant partie du paysage architectural quotidien, assemblés avec sensibilité. Pour ces deux artistes diplômés de l’Université Concordia, la matière, qui prend une grande importance dans leurs oeuvres, sert à projeter dans une expérience paradoxalement plus vaste et plus intime. La simplicité et l’efficacité des techniques utilisées et du rendu plastique ainsi que la maîtrise démontrée comptent parmi les forces de leur travail respectif. Un autre lien possible est l’implication physique et cognitive demandée au spectateur. Pour une expérience complète, immobile, se laisser aspirer puis bouger, en faire le tour. Le mouvement, suggéré ou réel, et la taille imposante des oeuvres de Spriggs comme de Villeneuve nous plongent dans un état contemplatif actif.
À voir si vous aimez /
Les hologrammes, le collectif BGL