Photographes rebelles : Les sortir de l'ombre
Arts visuels

Photographes rebelles : Les sortir de l’ombre

Photographes rebelles met en lumière le travail des artisans méconnus ou carrément oubliés de l’époque de la Grande Noirceur. Une mise au point après un demi-siècle d’éclipse totale.

Province de Québec, de 1937 à 1961. La photographie se modernise avec l’arrivée des automatistes, des plasticiens aussi. Tout ça, dans un contexte sociopolitique qui les étouffe, qui ira même jusqu’à les censurer dans certains cas.

"Ce sont de vrais rebelles parce que leur vision était complètement opposée à ce que le gouvernement considérait comme de la photo d’art. À l’époque, les photographes valorisés étaient ceux qui prenaient des clichés pour mousser l’industrie touristique et pour tisser des liens diplomatiques avec d’autres pays", laisse savoir Sébastien Hudon, commissaire de l’exposition Photographes rebelles et, aussi, collaborateur de Voir Québec.

Ouvertement dégoûtés par le style académique de ces photos politically correct qui transmettaient une perception idéalisée d’un Québec vivant alors sous le règne de Duplessis, ces photographes s’inscrivent en marge. Leur rupture avec la norme se manifeste dans leur démarche authentique et leur volonté de témoigner en photos d’une réalité autrement moins propre.

Des photographes comme Albert Dumouchel, Jauran, Guy Borremans, Vittorio Fiorucci auront ainsi été condamnés à l’anonymat jusqu’à ce que, au fil de longues recherches, Hudon mette la main sur les oeuvres de ces artistes, après être resté un été complet chez Borremans à restaurer ses photos et à découvrir d’autres artistes de la même époque qui ont, eux aussi, été censurés et vite oubliés.

C’est notamment le cas de Guy Borremans. Ses oeuvres de la série Chère, chair n’ont jamais été présentées, car l’escouade de la moralité les avait décrochées de force le jour de leur vernissage. Après un rendez-vous manqué le 16 décembre 1960, on remet ça 51 ans plus tard, en 2011.

En tout, l’exposition compte 85 oeuvres photographiques inédites comme celles de Tremblay. Ajoutez à ça des enregistrements pirates de musique jazz de l’époque et des films – Omer Parent et Guy Borremans étaient aussi cinéastes à leurs heures – qui viennent compléter cette exposition qui se veut d’abord et surtout un condensé de découvertes.

"La femme image de Borremans est un film absolument fascinant. D’abord parce que c’est une oeuvre surréaliste. Mais aussi parce qu’il s’agit du premier film de nu québécois. Les gens seront surpris, comme je l’ai été, d’apprendre que ce n’est pas Valérie de Denis Héroux!" rigole Sébastien Hudon.

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