Guillaume Tardif : Abandons en série
Arts visuels

Guillaume Tardif : Abandons en série

Guillaume Tardif présente à L’ÉTABLI ses oeuvres récentes, au confluent de l’installation, de la photographie, de la vidéo et du design industriel.

Intitulée Dans le décor, l’exposition sera l’occasion "de mesurer l’impact de notre présence dans le paysage, ce qu’on abandonne derrière nous, et de s’interroger sur ce qu’est véritablement le paysage", raconte avec enthousiasme son concepteur. Pour instituer une réflexion nuancée sur cette question, la présentation se divisera en trois volets.

Ainsi que l’explique Guillaume Tardif, "le premier volet, qui est à l’amorce de tout le projet, est conçu comme un panorama. Il s’agit principalement d’images de carcasses d’automobiles réalisées lors d’une traversée du désert de l’Australie en voiture". On y voit des épaves de voitures corrodées, victimes d’accidents violents ou de pannes momentanées, qui ont été énigmatiquement abandonnées le long de la route désertique.

Dans cette fresque de grandes dimensions accrochée au mur et alignée suivant une même ligne d’horizon, une vidéo en stop-motion (animation image par image) s’intégrera aux photographies. S’expliquant sur le sens à donner à cette suite de clichés, l’auteur insiste sur le fait que "chaque image pose une question et raconte une histoire que le spectateur est libre d’interpréter à sa guise. Pour ma part, j’aime laisser planer le mystère pour que chacun puisse participer à sa manière en s’inventant un récit sur les pièces".

La deuxième partie de la présentation est une installation sculpturale qui fait intervenir le visiteur concrètement dans l’oeuvre en reprenant l’idée du montage à la chaîne. Une notion chère à cet artiste dont la formation première relève du domaine du dessin industriel: "Le concept est basé sur le modèle miniature "prêt à monter". Le visiteur sera donc appelé à assembler certaines de ces épaves en carton, qu’il pourra ajouter lui-même à un amas de véhicules dans l’espace de la galerie." L’idée est d’intégrer les répétitions respectives d’une action et d’une image pour renforcer l’interprétation sur "les notions d’abandon, de rejet, des notions qui sont au coeur de nos rapports avec les objets que nous consommons, mais qui sont selon moi aussi très présentes dans certains de nos rapports d’individu à individu", explique-t-il.

La troisième section du corpus sera constituée "d’un grand puzzle où les gens vont être invités à reconstituer, à partir de fragments, une image sur un billboard d’affichage publicitaire vierge comme ceux que l’on croise le long des routes. Celui-ci sera aussi accompagné de petites maquettes en 3D produites en série. Encore une fois, il s’agit d’une façon de parodier l’acte industriel répétitif intervenant dans la création d’objets".

En somme, cet accrochage saura surprendre par la variété et la cohérence de sa proposition sans pourtant prendre un parti écologiste ou moralisateur. Une ode sensible à nos dépossessions quotidiennes.