Mathieu Latulippe : Question de taille
Arts visuels

Mathieu Latulippe : Question de taille

Mathieu Latulippe nous offre beaucoup dans Bien peu de choses en somme… #2. Une expo plus grande qu’il n’y paraît.

Il semble qu’une nouvelle galerie ait vu le jour dans l’édifice Belgo.

Sur une porte qui, il n’y a pas si longtemps, donnait accès à l’espace de rangement de la galerie Circa, sont bel et bien inscrits les mots Galerie/Gallery Banca Rupta… De gros intérêts étrangers (italiens peut-être?) seraient-ils derrière ce nouveau projet? Les rumeurs vont bon train dans le Belgo. À l’intérieur, une expo de Mathieu Latulippe. Le jeune artiste soutenu par d’importants fonds va enfin pouvoir voir grand et devenir big?

Pourtant, dans la galerie, Latulippe a joué sur le mini, le petit format, la miniature même. Certaines images sont tellement minuscules qu’elles sont à la limite du visible… Pour les presbytes et ceux qui n’auraient pas apporté leurs lunettes ou leur loupe, je vous dévoile le secret de ces images: elles montrent des casinos à travers le monde (Las Vegas, Atlantic City, Macao, Dubaï…). Mais que s’est-il donc passé pour que ces endroits à l’architecture imposante soient devenus si petits?

Dans un coin de cette microgalerie, là encore dans un format presque minuscule, Latulippe a reproduit la couverture du livre Small Is Beautiful: A Study of Economics As If People Mattered de E.F. Schumacher. Dans cet ouvrage de 1973, cet économiste dénonçait déjà le système de surconsommation, de surproduction et de profits toujours plus gigantesques dans lequel nous vivons. Juste à côté, une image de l’Empire State a été tronquée, réduisant ce gratte-ciel à un "tape-sol"…

On l’aura compris, Latulippe se joue de notre désir de grandeur. À une époque où les artistes font dans le super-méga-gigantesque, dans l’oeuvre très grand format pour très grands lofts de collectionneurs très très riches, voilà qui n’est pas sans incarner une position critique nécessaire.

Latulippe nous dit comment les sociétés qui ont incarné la richesse et la grandeur se sont écroulées. La société états-unienne ne fera pas exception à cette règle. Un jour, elle aussi fera banqueroute… D’ailleurs, déjà, la Chine semble voler la vedette à nos voisins du sud. Latulippe nous parle de cela en nous montrant une vision de l’avenir, une image de la conquête spatiale où ce n’est pas le drapeau des États-Unis, mais celui de la Chine qui est planté sur des territoires extraterrestres… Une expo qui aurait pu s’intituler "Le déclin de l’empire américain".

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